« Après le discours de Ouagadougou, celui de Paris, pointe Jeune Afrique. Plus de cinq ans après s’être exprimé devant des étudiants burkinabè dans un amphithéâtre de l’université Joseph Ky Zerbo, c’est depuis la salle des fêtes de l’Élysée qu’Emmanuel Macron a décliné, hier, ce qu’il a présenté comme ‘un nouveau modèle de partenariat’ entre la France et l’Afrique. Le tout avant une tournée au pas de charge en Afrique centrale – qui le mènera, à partir de demain, au Gabon, en Angola, au Congo et en République démocratique du Congo – et dans un contexte de rejet, parfois violent, de la France dans bon nombre de pays francophones. »
En effet, développe Jeune Afrique, « à l’heure où le sentiment anti-français a le vent en poupe et où ses militaires ont été chassés du Mali et du Burkina Faso, Emmanuel Macron, parfois accusé d’arrogance par certains, a joué la carte de l’humilité et tenté de redorer l’image écornée de Paris. ‘Nous entrés dans une nouvelle ère. La prééminence du militaire et du sécuritaire est terminée’, a-t-il déclaré, ajoutant n’avoir ‘aucune nostalgie de la Françafrique’. Après dix ans d’engagement militaire au Mali pour un résultat plus que mitigé, le président français a estimé : ‘ce n’est pas le rôle de la France d’apporter, seule, des réponses politiques qui doivent prendre le relais de la réponse militaire’. »
Une nouvelle voie…
Un discours largement commenté par la presse du continent…
« Relations France-Afrique : Macron préconise une nouvelle approche », titre WalfQuotidien au Sénégal qui note que le président français a invité « ses compatriotes à avoir un nouveau regard sur l’Afrique et à se départir des vieux réflexes, habitudes et langage teintés d’arrogance qui ont été trop souvent leur handicap sur le continent. »
« Macron cherche sa voie », renchérit le quotidien 24 Heures. « Le monde est cul par-dessus tête, les zones d’influences disparaissent, les alliances se font et se défont ! La France est contestée de toutes parts sur le continent au point qu’elle n’a plus de marge de manœuvre. Si elle avance à visage découvert, c’est un tollé, si elle avance masquée, elle se fait repérer et c’est pire encore. »
Y croire ?
Mourya La Voix du Niger veut croire à un vrai partenariat économique : « l’Afrique va inviter la France et ses investisseurs à réaliser du co-développement, du gagnant-gagnant à la française. Désormais, les matières premières extraites du sous-sol africain seront transformées sur place pour mieux offrir des emplois, mieux partager les revenus, les expériences (…). L’Afrique cessera d’être un ‘pré-carré’, si les enfants africains se sentent mieux respectés, intégrés et associés à la vie de la grande Nation franco-africaine, où qu’on le veuille ou pas, la langue française est un outil commun à vocation internationale (…). »
« Paris peut-elle vraiment opérer sa mue ? », s’interroge Le Pays au Burkina Faso. « La question est d’autant plus fondée que de Sarkozy à Macron, la mort, maintes fois annoncée de la Françafrique, a toujours juré avec la réalité des faits. Au point que même de nos jours, des piliers de cette politique de l’ombre à la fois opaque et ambiguë de la France se comptent aujourd’hui encore dans des pays comme le Gabon et le Congo-Brazzaville, pour ne citer que ces deux qui sont au programme de cette tournée africaine du patron de l’Élysée. Autant dire que dans la forme, il ne s’agit pas d’annoncer des changements en trompe-l’œil en pensant pouvoir maintenir dans le fond les mêmes vieilles pratiques. »
Ledjely en Guinée reste prudent également : « dans les rapports entre la France et l’Afrique, des belles intentions à leur matérialisation, il y a souvent tout un océan. Or, c’est à l’aune de sa capacité à honorer ses engagements d’hier qu’Emmanuel sera jugé. (…) Seuls les vrais leaders sont capables de passer des intentions aux actions. Et dans le cas présent, le défi de la matérialisation des engagements est d’autant plus important que pratiquement tous les prédécesseurs de Macron s’y sont cassés les dents. D’ailleurs, s’interroge Ledjely, sait-on seulement à qui la France devra-t-elle témoigner respect et considération ? Est-ce aux leaders africains ? Est-ce aux peuples ? Question sans doute difficile à trancher. Car si aujourd’hui les Maliens semblent faire fusion avec les autorités de la Transition, ce n’est pas nécessairement le cas au Tchad, au Cameroun ou encore au Congo-Brazzaville. »