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Blé Goudé salue la politique d’urbanisation du président Ouattara

Depuis La Haye: Blé Goudé salue la politique d'urbanisation du président Ouattara

Dans un message dont copie a été adressée à Imatin.net, Charles Blé Goudé, détenu à La Haye, a souhaité ses vœux de nouvel an aux ivoiriens. Il a profité de l’occasion pour donner sa position sur la situation politique de la Côte d’Ivoire.

Ivoiriens, ivoiriennes,
Frères et sœurs africains,
Citoyens du monde entier,
Comme un aéronef à cours de carburant, l’année 2014 vient de s’évanouir dans l’océan avec son cortège de promesses non tenues et de vœux non exaucés. Sur la piste s’est posé 2015 qui vient de prendre son envol avec à son bord ses espoirs.

A l’aune de l’année 2014, en cette période classique de présentation de vœux aux personnes que l’on aime, à ceux qui nous coûtent chers, aux personnes qui comptent pour nous et pour qui nous comptons, je ne pourrai malheureusement exprimer de vive voix mes fraternels et affectueux vœux. Pour avoir résisté avec vous, pour avoir défendu avec vous la Démocratie, pour avoir défendu la République de Côte-d’Ivoire, ses institutions et ses valeurs, je me trouve hélas contraint à être encore une fois loin des miens, loin de vous. Pour autant, je m’en voudrais de me soustraire à ce rituel.

Chers frères et sœurs, chers compatriotes, dans cette épreuve votre soutien ne m’a jamais fait défaut. Vous avez été très nombreux à travers le monde à me témoigner votre soutien et votre solidarité à travers votre mobilisation, vos prières et vos différents messages qui me sont parvenus. Il me plait donc de saisir cette autre occasion pour vous témoigner mon infinie gratitude et vous dire que mes pensées restent particulièrement tournées vers vous, vers mon pays la Côte-d’Ivoire et vers l’Afrique. Je pense de façon toute spéciale aux opprimés, aux victimes des crises, aux orphelins, aux veufs, aux veuves, aux déplacés et réfugiés de guerres, aux exilés et prisonniers politiques, à tous ceux qui, du fait de la crise se retrouvent sans emploi, aux malades, en un mot aux couches les plus vulnérables, à tous ceux qui souffrent dans leur chair et dans l’esprit.

A vous tous, à tous les Ivoiriens, aux Africains et aux citoyens du monde sans exception, il me plait de sacrifier à la tradition en vous formulant mes vœux les plus sincères. Mais avant, jetons ensemble un regard rétrospectif dans le rétroviseur pour nous plonger dans le souvenir d’événements majeurs qui auront marqué la page qui vient de se tourner.

AU PLAN INTERNATIONAL

Rythmé et gangréné par des conflits géostratégiques aux odeurs d’intérêts économiques, notre monde va à la dérive. La violence a gagné en intensité dans de nombreux endroits du globe. Notre monde chancelle et inquiète. Avec la crise Ukrainienne, la Russie est ouvertement en guerre avec le bloc occidental. La chute du régime de Saddam Hussein a favorisé l’émergence de l’Organisation de l’Etat Islamique en Irak et en Syrie. Quant à la Libye post Kadhafi, elle est devenue un no man’s land. Elle sert désormais de base arrière et de réserve aux djihadistes et autres narcotrafiquants. Ils continuent de semer la terreur dans le nord Mali tout comme ils règnent toujours en maîtres absolus dans le sahel, malgré l’intervention militaire d’une force internationale sous couvert de ‘’l’opération Serval’’.

Syrie, Irak, Crimée, Proche-Orient, Libye, Nord du Mali, Nigéria, les réfugiés et les victimes se comptent par centaines de milliers. Le radicalisme s’est accru et vient de frapper la France au cœur de sa capitale, endeuillant toute une nation et jetant l’effroi dans le monde entier.

Serait-on en train d’assister impuissant à un recul de notre société ? Est-ce le retour à l’état de nature avec le règne de la force dont chaque camp tente d’en légitimer l’usage?

L’histoire quant à elle nous enseigne éloquemment que toute victoire acquise par la force est éphémère. Vouloir donc imposer la paix par la force ne semble pas être une solution pertinente et durable. De même, la démocratie canonnière ne saurait être une panacée face aux supposés déficits démocratiques. Cette prescription me parait inadaptée, donc non indiquée pour promouvoir les valeurs sociétales et faire face au mal qui ronge notre monde. Au contraire elle aliène; elle peut certainement endiguer, malheureusement elle ne participe pas à éradiquer la violence et le radicalisme.

Dès lors, n’est-il pas temps, grand temps d’explorer d’autres voies ? Comme un noyé qui a besoin de toucher le fond pour remonter à la surface, sommes-nous incapables de puiser au fond de nous-mêmes pour sortir de cette impasse ? En sommes-nous inaptes ? Telles sont les interrogations qui questionnent notre esprit en cette année 2015. Y trouver une solution nous parait comme un devoir vu que l’activité élémentaire de l’être humain, en tant que déviant positif, consiste à créer l’avenir. Notre intelligence est ainsi mise à rude épreuve.

En ce qui me concerne, j’ai la ferme conviction qu’il est encore possible de rehumaniser le monde; on peut bâtir un monde plus solidaire, un monde de partage, un monde plus juste et égalitaire. Je crois qu’il est possible de venir à bout de la violence dans le monde. Je sais qu’on peut construire une Paix durable dans le monde, pourvue que nous nous y attelons dès maintenant

Persuader, enseigner les valeurs, chercher à convaincre les partisans de la violence au lieu de s’employer à les vaincre, désendoctriner et recycler en vue de réinsérer, construire la paix dans l’esprit, telles sont les axes de réflexions que je soumets à nos consciences en cette année 2015, afin de faire l’économie de ces nombreuses pertes en vies humaines.

La démocratie ne doit pas servir de paravent pour mener des guerres asymétriques, géostratégiques et économiques pour imposer une hégémonie. Le combat pour la démocratie doit être une préoccupation permanente, réelle et sincère pour tous les leaders de ce monde. Que l’année 2015 consacre la Paix et l’Amour dans le monde, l’Amour entre les peuples, l’Amour entre les citoyens du monde entier.

AU PLAN AFRICAIN

L’Afrique tarde encore à passer le cap des guerres fratricides, des rébellions armées, des coups d’états militaires et constitutionnels. Les cas de la République Démocratique du Congo, de la République Centrafricaine, du Mali et du Nigéria ont essentiellement marqué l’année 2014. L’Afrique de l’ouest a été notamment le théâtre de nombreux soulèvements populaires, en particulier au Togo, au Gabon et au Burkina Fasso.

Nos cœurs restent encore tendus vers ces familles, qui, dans la douleur et l’angoisse sont toujours sans nouvelles de leurs filles enlevées par Boko-Haram au Nigeria. L’émouvante campagne médiatique du fameux « BRING BACK OUR GIRLS » n’ayant pu être à la hauteur de l’espoir suscité, de pauvres innocentes jeunes filles continuent de payer l’impôt de la souffrance et des larmes dans le silence, si ce n’est dans l’indifférence.

Comme si cela ne suffisait pas, dans ce champ sémantique de douleurs et de pleurs, sont venus s’amonceler des nuages si lourds qui ont chargé le ciel Africain d’une épidémie assassine qui laisse derrière elle des familles inconsolables : la maladie à virus Ebola ! Plus de 8 000 morts à ce jour, selon le dernier bilan de l’OMS : pauvre Afrique !

Heureusement qu’une promenade dans ce vaste désert de désespoir auquel notre continent semble condamné, nous permet de goûter au délice d’une oasis d’espoir dont la flamme a été allumée par le vaillant peuple Burkinabé. La chute du dictateur Blaise Compaoré a achevé de convaincre les Afro-pessimistes que tout est mouvement, tout bouge, le curseur politique avec. Le cas Burkinabé vient rappeler fort opportunément aux ‘’indéboulonnables’’ que rien n’est éternel. Nous devons tirer toutes les leçons de ces événements qui nous enseignent que quels que soient leur enracinement et leur longévité, les dictatures ne peuvent résister à la lutte que mènent les peuples pour s’affranchir de l’oppression. Autrement dit, la révolution a son propre calendrier qui fait souvent mentir nos petits calculs et nos agendas secrets. Enfin, par l’action, la victoire du peuple Burkinabé ouvre un nouvel horizon aux peuples africains en lutte contre les modifications constitutionnelles taillées sur mesure.

En cette année 2015, mon vœu le plus cher pour l’Afrique est qu’elle construise la démocratie à partir des valeurs culturelles africaines et qu’elle tourne définitivement le dos à la guerre et aux rebellions armées afin de faire face aux vraies défis qui se présentent à elle. La misère, la famine et les épidémies auxquelles nos populations sont exposées l’exigent. Cela suppose une véritable prise de conscience africaine pour que l’Afrique s’assume et qu’elle cesse d’être un fardeau pour le reste du monde. Ne l’oublions jamais, cher frères et sœurs africains, la main qui donne est la main qui ordonne tout comme la main qui emprunte reste toujours esclave de celle qui prête. De ma cellule de prison, je caresse le rêve que dans l’unité, par le travail notre continent sera aussi un jour une main donatrice.

EN CÔTE-D’IVOIRE

Au-delà des slogans et des campagnes médiatiques à objectifs publicitaires et propagandistes, aucune avancée notable n’a été enregistrée, en particulier au plan politique, économique, agricole, sanitaire, scolaire, universitaire et social. Partenaires et adversaires au régime ivoirien s’interrogent encore sur le modèle de gouvernance actuelle marquée par une curieuse croissance dont les effets ne sont pas ressentis dans le quotidien des ivoiriens au pouvoir d’achat cachectique. Les prix d’achat des principaux produits agricoles notamment le cacao, le café, le coton, l’anacarde, l’hévéa, le palmier à huile, pour ne citer que ceux-là, ont baissé de façon drastique, comme cela n’a jamais été. Le non-respect des droits de l’homme, de la liberté d’expression et d’opinion sont entre autres quelques indicateurs suffisamment évocateurs de la Côte-d’Ivoire d’aujourd’hui. Même le zouglou, rythme musical dénonciateur des maux qui minent notre société est devenu muet ; certainement pas par manque d’inspiration.

Le non-respect des droits de l’homme, de la liberté d’expression et d’opinion sont entre autres quelques indicateurs suffisamment évocateurs de la Côte-d’Ivoire d’aujourd’hui. Même le zouglou, rythme musical dénonciateur des maux qui minent notre société est devenu muet ; certainement pas par manque d’inspiration.

Au plan de la réconciliation, la forteresse de la division et de la méfiance n’a encore pu être brisée. Ses murs ont bien au contraire augmenté en longueur. Les tranchées, les fissures se sont grandement approfondies. Une situation qui donne lieu à l’existence de deux camps ennemis dont l’un n’entend rater aucune occasion pour en découdre avec l’autre ; preuve que le feu couve encore et que notre pays n’a pas encore franchi la phase du conflit. Il serait par conséquent illusoire de croire que l’absence de confrontation armée est synonyme de paix.

Dans un tel pays où la passion a pris le pas sur la raison, il n’est pas aisé de se hasarder à faire un bilan objectif, une analyse objective sans courir le risque de se faire brocarder, se faire traiter de déstabilisateur ou de vendu, dans un camp comme dans l’autre selon les enjeux qui commandent les prises de positions.

Les réflexions sont otages des distributeurs de bons et mauvais points : ces gens qui ne se sentent jamais responsables de rien et qui sont toujours prompts à accuser les autres d’être la cause du mal. En sus, la coalition au pouvoir, pourtant chargée de rassembler et de rassurer tous les ivoiriens, peine encore à ôter ses gants et à substituer à ses méthodes de conquête du pouvoir un discours et un comportement adaptés à ses nouvelles responsabilités que lui imposent désormais la gestion du pouvoir d’Etat. C’est à juste titre que certains observateurs avertis de la scène politique ivoirienne commencent à s’interroger. Le retour à un climat politique apaisé ne constitue-t-il pas une hantise pour un pouvoir qui, craignant une compétition politique réelle voudra se choisir ses propres adversaires et avoir son opposition politique sous contrôle ? En d’autres termes, les autorités ivoiriennes n’ont-elles pas peur de la réconciliation ? Au lieu de s’adonner à combler les ravins laissés par les stigmates de la guerre, le régime ivoirien présente les symptômes d’un pouvoir qui, pour vaincre sa propre peur a fait le choix de faire peur à ses adversaires. L’arrestation récente du Ministre ASSOA Adou en est un exemple patent. La prison est devenue un instrument de chantage politique ; on y enferme systématiquement tout citoyen qui ose revendiquer.

Au nom de la politique dite d’assainissement et d’urbanisation (salutaire mais inopportune et inappropriée dans un pays post-crise), les bulldozers continuent de détruire les petits commerces et les habitations des pauvres citoyens sans défense. Ces populations qui, hélas ont eu la malchance de ne pas être des FRCI (Forces républicaines de Côte-d’Ivoire) ; ces forces militaires qui ont pour seul mérite de savoir se servir d’une kalachnikov ont eu la satisfaction de l’ensemble de leurs revendications en moins d’une journée de manifestation.

A l’opposé, le traitement réservé aux indignés, le mépris essuyé pas ces pauvres ivoiriens désormais sans emploi, suite à la mesure interdisant la production et la commercialisation de sachets plastiques, la bastonnade et l’arrestation des épouses des prisonniers politiques, l’indifférence méprisante affichée par le régime face à la grève des prisonniers politiques, tout cela se passe de commentaires. Pourtant, dans une République, tout le monde ne saurait revendiquer avec les armes. Tous les ivoiriens ne sauraient être des FRCI.

Le désespoir conduisant au suicide, c’est avec stupéfaction que pour la première fois dans l’histoire de notre jeune nation un être humain perdu dans le tourbillon des vicissitudes de la vie décide de s’immoler, de surcroît devant le palais de la Présidence de la République. Pauvre Côte-d’Ivoire ! Pendant ce temps, les familles, les proches, amis et connaissances des prisonniers politiques, des militaires et des exilés souffrent dans leur chair et ruminent vengeance.

Aucune fleur ne pouvant jamais éclore sur un sol carbonisé, le moins que nous puissions souhaiter à notre pays en cette année 2015 c’est la victoire de l’Amour sur la haine. Oui, chers frères et sœurs, notre pays ne pourra sortir de l’impasse que par la culture de l’Amour et de l’acceptation mutuelle, dans le respect de nos différences. Il nous faut inscrire sur les pages de notre passé récent et douloureux le mot ’’pardon’’, pour ouvrir une page nouvelle sur laquelle nous devons écrire une histoire nouvelle.

Je voudrais que cette certitude vous habite et vous détourne du découragement et de la résignation, et qu’elle nous ouvre les voies de l’espérance et de la volonté. Je nous invite donc, nous tous, à accepter, même le cœur serré, à quitter le stade de la confrontation et de la belligérance permanente pour ensemble reconstruire par-dessus les ruines. Cela s’appelle : « quitter le pire pour le meilleure en passant par la fournaise. » Car voyez-vous, nous parlons tous de paix et de réconciliation dans notre pays mais, personne n’est prêt à payer le prix du sacrifice pour y parvenir. Or, quoi qu’il en soit, tout ce que nous acquérons dans la vie est le résultat d’un quelconque sacrifice. Notre avenir et celui des générations à venir sera le fruit de nos choix responsables, de nos sacrifices d’aujourd’hui. Combattons donc la haine par l’Amour. Tel doit être notre leitmotiv ! Tel doit être notre défi et notre but commun! Les fuir serait refuser de vivre car le plus grand drame n’est pas de mourir mais de vivre sans but précis.

Au-delà de nos ambitions personnelles et égoïstes, de nos agendas personnels souvent sources de conflits, notre pays a aujourd’hui plus que jamais besoin d’une voix qui puisse indiquer la voie nouvelle. Une voie que doit oser porter une équipe courageuse qui prendra la responsabilité historique de dire, ça suffit ! Il nous faut impérativement réinventer cette nouvelle voie, la voie de l’unité, à travers un nouveau modèle de rassemblement. Car, plus que jamais la Côte-d’Ivoire est un tout qui a besoin de tous. Ainsi, lorsque la Côte-d’Ivoire notre cher patrie dira un jour à chacun de nous : « j’étais nue et vous ne m’avez vêtue, » œuvrons pour que le patronyme que nous laisserons en héritage à notre progéniture ne puisse être inscrit du côté des mis en cause.

Chers frères et sœurs, dans cette épreuve soyons solidaires et unis. En ce qui me concerne, de ma cellule de prison, loin de mon pays bien aimé, je continuerai toujours de prier pour que la sagesse visite le cœur de chaque ivoirien afin que chacun évite de ‘’tirer sur l’ambulance ‘’.

Ivoiriens, ivoiriennes,
Frères et sœurs africains,
Citoyens du monde entier,

Comme on le voit, notre monde va mal, l’Afrique est encore à la traine et avec elle la Côte-d’Ivoire. Il nous faut agir ensemble maintenant ! Il est temps, grand temps de rallumer les étoiles et d’éveiller les consciences à prendre le flambeau. Rallumons ensemble les étoiles pour convaincre qu’une société de valeurs, de Solidarité, d’Humanisme, d’Egalité, de Justice, de paix et d’Amour est encore possible.

Paix et Amour sur la Côte-d’Ivoire.
Paix et Amour en Afrique et dans le monde.
Bonne et Heureuse année 2015 à toute et à tous.
Un jour, il fera jour !
Je vous Aime.
CHARLES BLÉ GOUDÉ
Ancien Ministre de la Jeunesse et de la Formation Professionnelle
Consultant en Communication Politique
Président Fondateur du COJEP, détenu à La Haye

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