Le Japon compte rejeter des eaux contaminées car il n’arrive plus à les stocker. Après le tsunami et l’accident nucléaire qui a frappé la centrale de Fukushima en 2011, il a fallu utiliser des millions de litres d’eau pour refroidir les réacteurs. Mais au contact des différentes substances radioactives, l’eau a été contaminée, il n’était pas possible de la déverser directement dans l’océan, il a donc fallu la placer dans de grandes citernes. Mais celle-ci a été mélangée à de l’eau de pluie, à de l’eau des nappes souterraines et désormais, il n’y a plus de place pour la stocker.
Le Japon assure avoir traité les 1,32 million de tonnes d’eau pour retirer une grande partie des substances radioactives. Le processus a été scruté de près par l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qui a donné son feu vert. Les eaux contaminées devraient être rejetées dans les prochains mois.
Les Sud-coréens s’inquiètent néanmoins de ce projet validé par AIEA avec un argument scientifique : les technologies actuelles permettent de retirer une soixantaine de nucléides, de substance radioactive, mais pas le tritium, ce qui inquiète les pêcheurs japonais comme sud-coréens. Malgré cela, le projet reste conforme aux normes internationales selon l’AIEA.
Des différends non résolus entre le Japon et la Corée du Sud
Si d’autres pays voisins comme la Chine et Taïwan ont exprimé leur désaccord face au rejet des eaux, la Corée du Sud a été particulièrement véhémente. Cette méfiance s’explique notamment par les différends non résolus entre les deux pays autour des violences de l’État japonais durant la colonisation de la péninsule. Sous l’administration sud-coréenne précédente, les relations entre les voisins se sont dégradées au point de donner lieu à une véritable guerre commerciale.
Durant les Jeux olympiques 2021 à Tokyo, l’équipe sud-coréenne a même amené sa propre nourriture par crainte de voir ses athlètes manger des aliments radioactifs. D’ailleurs, les importations de poissons de huit préfectures japonaises sont toujours prohibées en Corée du Sud, alors que Taïwan a levé son interdiction.
Mais le nouveau président sud-coréen Yoon Suk-yeol s’est efforcé ces derniers mois à réchauffer les liens avec le Japon en faisant de nombreuses concessions sur les questions mémorielles. En retour, le Premier ministre japonais Fumio Kishida a donc invité des experts sud-coréens à examiner le processus de traitement des eaux contaminées. Mais ce n’est pas suffisant pour rassurer l’opinion publique sud-coréenne pour l’instant.
Les conclusions des experts scrutées de près
La crainte d’une partie de la population en Corée du Sud est que la visite de la délégation sud-coréenne – proposée par le Premier ministre japonais lors de son sommet avec le Président sud-coréen en début de mois – à Fukushima ne serve surtout à légitimer le projet japonais. D’autant plus que le détail de la mission menée par les 21 experts sont longtemps restés flous et ont donné lieu à de longues négociations entre Séoul et Tokyo. Après des rencontres avec les autorités japonaises ce lundi 22 mai, ils conduisent une inspection de la centrale mardi et mercredi avant de rentrer à Séoul ce vendredi.
Leurs conclusions seront scrutées de près en Corée du Sud où le sentiment anti-japonais et nationaliste reste très présent, notamment parmi l’électorat de l’opposition démocrate. Ce dossier est très sensible pour le président sud-coréen. Yoon Suk-yeol reste impopulaire après plus d’un an au pouvoir et une grande partie de sa légitimité politique s’est construite sur son rapprochement très prononcé avec Washington et Tokyo.