Les droits des étrangers en France se dégradent et le nombre de saisines explose en trois ans. C’est le premier motif de saisine du défenseur des droits en 2022, souligne la défenseure des Droits dans un rapport annuel 2022 publié lundi. De plus 6 000 en 2019, le nombre de réclamations est passé à près de 22 000 en 2022, soit une hausse de 231%. Cette augmentation est même de 450% en Île-de-France.
La raison principale, selon l’autorité indépendante dirigée par Claire Hédon, chargée notamment de défendre les citoyens face à l’administration, c’est la dématérialisation des démarches, estime le rapport. Prise de rendez-vous en ligne, renouvèlement de titre de séjour en ligne, demandes de naturalisation en ligne.
De pénibles démarches en ligne
Aujourd’hui, tout passe par internet. Avec parfois des dysfonctionnements techniques, des délais de réponse très longs. « Tout cela porte atteinte aux droits des personnes étrangères » dit la défenseure des Droits. Car, sans réponse pour un renouvellement de titre de séjour, par exemple, plus possible d’avoir un emploi ou de bénéficier de certains droits sociaux. Avec toutes les conséquences que cela engendre en termes de précarité.
Un constat que dresse aussi Lise Faron de la Cimade, une association qui œuvre pour les droits des étrangers et réfugiés. « Progressivement, les préfectures ferment leur porte aux personnes étrangères, souligne-t-elle. Aujourd’hui, on n’accède plus à l’intérieur d’une préfecture sans avoir préalablement fait une démarche en ligne. Donc, il peut s’agir de prendre un rendez-vous par internet. De plus en plus souvent, il s’agit de déposer sa demande en ligne en scannant toutes ses pièces et les personnes qui doivent faire leurs démarches sont vraiment livrées à elles-mêmes en termes d’accompagnement.»
« Report des missions »
« Vous ne pouvez plus accéder à un agent de guichet qui va vous conseiller sur la démarche. Du coup, les conséquences, c’est que les personnes vont devoir se tourner vers des associations, vers des avocats, vers des travailleurs sociaux, etc. On est vraiment dans une dynamique de report des missions des préfectures vers d’autres acteurs, notamment des acteurs issus du secteur privé, comme les associations », dit encore Lise Faron.
La défenseure des Droits soutient les personnes étrangères dans des règlements à l’amiable ou devant des tribunaux administratifs quand il y a litige. Et ces procédures engagées permettent, les trois quarts du temps, de rétablir les personnes étrangères dans leurs droits.