Tidjane Thiam, ancien directeur général de Crédit suisse parle du coup d’État militaire contre Henri Konan Bédié en 1999.
I – « Schématiquement, pour moi, dans les pays du tiers-monde, il y a deux types de régime : les régimes qui tuent et ceux qui ne tuent pas. Et j’étais très fier d’être ivoirien jusqu’en 1999 parce que nous étions dans un pays où la politique ne tuait pas ».
II – « Je dois dire que le coup d’Etat était populaire, les gens ne comprenaient pas ma position. Beaucoup de soi-disant démocrates ont applaudi le coup d’état et chaque fois, je répondais que c’était de la vue à court terme car c’était mauvais pour la démocratie qu’un des rares pays africains à ne pas avoir connu de coup d’Etat en connaisse un. J’étais persuadé que c’était le début d’un processus sans fin (…) Dans un pays où les institutions sont faibles, une fois que vous permettez à quelqu’un de faire ramper un ministre ou un membre d’un gouvernement avec un AK 47, ça ne peut que se reproduire encore et encore. »
III – « C’est toujours une mauvaise idée de construire son pouvoir sur la puissance militaire car quelqu’un aura un plus gros fusil que vous. »
Contexte
Henri Konan Bédié succède à Houphouët-Boigny après sa mort en 1993. Il était précédemment président de l’Assemblée nationale ivoirienne. Devenu dans un premier temps président par intérim, il est élu en octobre 1995, les autres candidats potentiels ayant boycotté le scrutin à la suite d’une réforme douteuse du code électoral en décembre 1994. Dans un pays où un tiers de la population est d’origine étrangère et où les migrants ont par le passé fortement participé au développement économique, la réforme électorale de Henri Konan Bédié introduit le concept d’ivoirité, pour écarter un des candidats les plus populaires, Alassane Ouattara. La situation économique continue de se détériorer. Henri Konan Bédié est accusé de corruption.