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Rumeurs persistantes de 3e mandat du president Ouattara : Ce qu’il faut vraiment craindre en Côte d’Ivoire

“J’y suis, j’y reste”. C’est par ce titre, qui barrait la manchette de l’une de ses publications, en octobre 2010, que Jeune Afrique révélait les intentions cachées de Laurent Gbagbo, à l’approche de l’élection présidentielle de 2010. Le moment venu, celui-ci afficha au grand jour sa volonté de se maintenir au pouvoir. Vaille que vaille. Pour ce qui apparaissait comme un troisième mandat.

La suite, on la connaît. L’entêtement de l’homme à se visser au fauteuil présidentiel, a eu pour effet de faire basculer le pays dans une guerre post-électorale aux conséquences désastreuses. Ailleurs, en Afrique, la tentation du 3e mandat fait tanguer des pays, quand elle n’en a pas précipité dans une spirale de violences. L’actualité récente donne de voir des pays en proie à une tourmente née de la velléité de certains chefs d’Etat, de s’arc-bouter au pouvoir. Envers et contre tout. Le Burundi est plongé dans un cycle de violence depuis que le président sortant, Pierre Nkurunziza, a réussi le tour de passe de s’offrir un 3e mandat.

En République démocratique du Congo ( Rdc) ou plus près de la Côte d’Ivoire, en Guinée Conakry, le quotidien des populations est affolé par les agitations sociopolitiques engendrées par des manifestations visant à faire barrage à une velléité de 3e mandat des présidents en exercice, Laurent Désiré Kabila et Alpha Condé. On pourrait multiplier les exemples qui en disent long sur le péril que fait courir à son peuple, un chef d’Etat tenté par l’aventure du 3e mandat. C’est pourquoi, le n°1 Ivoirien devrait saisir la moindre tribune, pour sortir de leur rêve, tous ceux qui, depuis quelque temps, lui font des appels du pied, visant à l’exhorter à briguer un 3e mandat.

 

En effet, on note une manœuvre insidieuse visant à faire dire à certains cadres du Rdr ou à d’obscures organisations de la société civile, qu’il faut un 3e mandat à Alassane Ouattara. Au motif qu’il faut lui laisser le temps de pacifier le pays, et achever ses grands projets de développement. Les chantres du 3e mandat s’étaient, au départ, bornés à réclamer un autre mandat pour le parti au pouvoir, le Rassemblement des républicains( Rdr). Ce parti, soutiennent-ils, ne saurait se contenter de passer dix ans au pouvoir, lui qui a tant souffert durant des années pour y accéder.

Dans le même temps, les militants du parti à la case verte se sont mis à réclamer que leur mentor reviennent prendre sa place à la tête du parti, apportant ainsi de l’eau au moulin de ceux qui voient là une manœuvre pour qu’il soit à nouveau proposé comme candidat du Rdr à la prochaine présidentielle. Le président du parti étant, d’ordinaire, le candidat naturel à l’élection présidentielle, sous les tropiques. Dans le camp des partisans du parti au pouvoir, on est donc en train de glisser subrepticement de la volonté de se maintenir au pouvoir vers un 3e mandat pour Ouattara.

L’intéressé, faut-il le rappeler, a déjà fait savoir qu’il n’entendait pas rempiler au terme du deuxième et dernier mandat que lui autorisait la Constitution de 2000. A-t-il revu ses prétentions depuis l’adoption de la Constitution de la 3e République, votée par référendum en 2016 ? On n’en sait rien. Toujours est-il qu’aux termes de cette Constitution, notamment en son chapitre 4, article 183, relatif à la “continuité législative”, Ouattara reste frappé par la limitation des mandats, inscrite dans la Constitution de 2000. De fait, dispose l’article 183, “la législation actuellement en vigueur en Côte d’Ivoire (allusion à la Constitution de 2000 en vigueur au moment de l’adoption de celle de 2016, ndlr) reste applicable, sauf l’intervention de textes nouveaux, en ce qu’elle n’a rien de contraire à la présente Constitution”.

 

En d’autres termes, l’actuel chef de l’Etat tombe sous le coup de la législation fixant le nombre de mandat à deux. Il s’ensuit qu’il serait hasardeux voire périlleux de le pousser dans le dos, pour espérer le voir briguer un 3e mandat. Céder à cette tentation serait ouvrir la porte au spectacle qu’il est donné de voir depuis quelques mois en Rdc ou plus récemment en Guinée Conakry où la tension monte, à l’idée que les présidents sortants seraient tentés par un 3e mandat. Surtout que l’on observe un trépignement assourdissant d’aspirants au fauteuil présidentiel, à quelque trois ans de la présidentielle de 2020.

Dans un tel contexte, un projet de 3e mandat va nécessairement se heurter au choc des ambitions. Celles du Pdci de Henri Konan Bédié, qui estime être légitimement fondé à succéder à Ouattara, en invoquant, à tort ou à raison, la clause de l’alternance en 2020, qui serait comprise dans l’appel de Daoukro. Celles aussi des Soroïstes et leur leader, qui croient le moment venu, pour Guillaume Soro, d’accéder à la magistrature suprême, après avoir longtemps servi d’échelle à l’ascension politique des autres. Celles enfin de l’opposition traditionnelle, constituée essentiellement de partisans de l’ancien régime Gbagbo. Ceux-ci rêvent, eux aussi, d’un retour aux affaires en 2020, y voyant le moyen le plus sûr de sortir du cauchemar qu’ils vivent depuis qu’ils ont perdu le pouvoir. Autant d’ambitions qui pourraient donner lieu à un climat délétère voire électrique.

Assane NIADA

linfodrome

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