04192024Headline:

Situation politique: Avant la présidentielle de 2020, certains partis ont opté pour Alassane Ouattara et d’autres pour Bédié.

Le constat est net. Les divergences entre Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié donnent lieu à une recomposition du paysage politique en Côte d’Ivoire. Avant même que la rupture ne soit consommée entre les deux hommes, les lignes avaient commencé à bouger de part et d’autre. Aujourd’hui, lorsqu’on fait le point, on se rend compte qu’il y a plus ou moins deux blocs. L’un conduit par le président d’honneur du Rassemblement des républicains (Rdr), Alassane Ouattara, et l’autre amené par le leader du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (Pdci), Henri Konan Bédié.

Ce qui est on ne peut plus remarquable, c’est le fait que chaque bloc de presque tous les partis politiques, qui sont traversés par des divisions, ont choisi entre ces deux ex-alliés. Certains ont opté pour Alassane Ouattara et d’autres pour Bédié.

Ainsi, au Parti ivoirien des travailleurs (Pit), Joseph Séka Séka a adhéré au parti unifié-Rassemblement des houphouétistes pour la démocratie et la paix (Rhdp) dont le président est le chef de l’Etat, Alassane Ouattara. Son rival politique, Aka Ahizi Daniel, qui revendique toujours la présidence du parti fondé par Francis Vangah Romain Wodié, est allé « se jeter dans les bras » du Sphinx de Daoukro. En tout cas, il a fait, plus d’une fois, le déplacement du domicile de Bédié aussi bien à Abidjan qu’à Daoukro. Tout comme lui, le fondateur du Pit a été reçu, vendredi 3 août 2018, à Cocody, par le leader du parti septuagénaire. Cette rencontre avait été précédée de celle du lundi 26 février 2018. A l’issue des échanges, M. Wodié, qui a été ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche scientifique de Bédié, se disant préoccupé par la situation socio-politique, a demandé à l’ex-chef de l’Etat ivoirien « de peser de tout son poids sur l’évolution de la situation pour que nous allions vers des solutions consensuelles, pour que les Ivoiriens puissent se parler ».

Au Mouvement des forces d’avenir (Mfa), la situation est similaire à celle du Pit. Siaka Ouattara s’est engagé dans le Rhdp-unifié avec un bout du parti. Quant à Azoumana Moutayé, qui lui dénie la qualité de président, il s’est rapproché du successeur de Félix Houphouët-Boigny à la tête de l’Etat et du Pdci. Il a rejoint dans ce camp son autre ex-rival, qui n’est autre qu’Innocent Anaky Kobena. Fondateur du Mfa, il est fréquent chez Bédié. Sa dernière visite rendue au président du Pdci date du mercredi 25 juillet 2018 à Daoukro. Anaky Kobena a plaidé, à cette occasion, pour un « regroupement…pour une victoire cinglante et décisive, par la voie démocratique des urnes, à la présidentielle de 2020 ».

L’Upci aussi. Le Pit et le Mfa ne sont pas les seuls partis divisés. L’Union pour la Côte d’Ivoire (Upci) vit une situation. Un groupe de personnes a mis à la tête de ce parti, samedi 7 juillet 2018, au Palais de la culture d’Abidjan, Dr Serge Anicet Yao Brou. Aussitôt, il a décidé d’adhérer au Rhdp-unifié, contrairement à la décision du congrès du samedi 28 avril 2018 de l’Upci de Me Soro Brahima, tenu au Palais de la culture à Treichville.

Comme Aka Ahizi Daniel et Azoumana Moutayé, qui ne sont pas reconnus par le Rhdp comme premier responsable de leur parti, Soro Brahima s’est dirigé vers Bédié. Et, à l’instar des fondateurs du Pit et du Mfa, Gnamien Konan a aussi rejoint le « Bouddha de Daoukro ». « J’ai un seul message pour lui. Houphouët ne lui a pas confié que le Pdci. Il lui a confié la Côte d’Ivoire. Aujourd’hui, plus qu’hier, le destin de ce pays se trouve entre ses mains pleines d’expérience. Sa place n’est plus dans un parti. Sa place n’est plus dans un regroupement de partis, même unifié. Il doit se mettre là-haut, au-dessus des clans, à équidistance de tout le monde, pour réconcilier les Ivoiriens. C’est ça l’héritage que Félix Houphouët-Boigny lui a confié », avait posté sur sa page facebook, le fondateur de l’Updci, Gnamien Konan, avant sa rencontre du samedi 28 juillet 2018 avec Bédié, à Daoukro.

A l’analyse, des bouts du Pit, du Mfa et de l’Upci sont avec Alassane Ouattara dans le parti unifié-Rhdp. Et d’autres morceaux de ces partis politiques, avec des présidents contestés par le pouvoir en place, sont en phase avec Bédié. A la différence que les présidents-fondateurs de ces trois formations politiques en crise ont pris le parti du « vieux » parti.

Même le Pdci n’échappe pas à cette division. Des cadres comme Daniel Kablan Duncan, Kobenan Kouassi Adjoumani, Ahoua N’Doli Théophile, Louis Kouakou Habonouan, Ehui Koutouan Bernard, Amédé Koffi Kouakou, Silué Kagnon…ont affiché leur préférence pour le parti unifié de M. Ouattara.

Il reste les partis qui n’ont jamais été membres du Rhdp. A la tête de ceux-là, se trouve le Front populaire ivoirien (Fpi). Si le parti fondé par Laurent Gbagbo, actuellement jugé à La Haye pour crimes contre l’humanité, est divisé, il sera difficile que l’un des camps opposés bascule du côté du président ivoirien. Même si en politique, toutes les alliances sont possibles, vu les récents antagonismes, il sera difficile, pour l’heure, que l’un des camps au Fpi s’allie au parti unifié-Rhdp. Mais avec Bédié, les choses sont en train de se mettre en place.

Pascal Affi N’Guessan, à la tête de son Fpi, a déjà échangé avec Bédié plusieurs fois. Au cours de leur dernière rencontre, celle du vendredi 10 août 2018, à Cocody-Les Ambassades, l’ex-Premier ministre de Gbagbo lui a marqué sa disponibilité à tisser une alliance avec le Pdci dans la perspective des municipales et régionales du samedi 13 octobre 2018. Interrogé par la presse, Bédié a dit que « rien ne s’oppose à ce que, dans une plateforme comportant toutes les forces vives de la nation dont les partis politiques, le Pdci et le Fpi se retrouvent ensemble ».

Contacts du Pdci avec les Gor. Du côté du Fpi-pro Sangaré, appelés les « Gbagbo ou rien » (Gor), même s’il n’y a pas de rencontres officielles avec le Pdci pour évoquer des alliances, les deux groupes se parlent déjà. Le Secrétaire exécutif du Pdci chargé de l’information, de la communication et de la propagande, l’ex-ministre Jean-Louis Billon, a conduit, samedi 11 août 2018, une importante délégation de son parti, à la Riviera-Golf, chez l’ex-Première dame, Simone Gbagbo. Auparavant, il s’est rendu à La Haye, les jeudi 26 et vendredi 27 juillet 2018, pour visiter Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé. Jean-Louis Billon a révélé, samedi 18 août 2018, au stade Victor Biaka Boda de Gagnoa, lors d’un meeting de soutien au président de son parti, que c’est Bédié lui- même qui l’a mandaté pour effectuer ces deux visites.

Au meeting de la jeunesse de la coalition Ensemble pour la démocratie et la souveraineté (Eds), dont le référent est Laurent Gbagbo, samedi 28 juillet 2018, à Yopougon, l’ex-député et membre du Bureau politique du Pdci, Gouali Dodo Basile, est allé transmettre le message de Bédié.

C’est dire que les lignes bougent…Il n’est donc pas impossible que les deux blocs du Fpi se retrouvent d’une manière ou d’une autre avec Bédié.

Il en est de même pour le Congrès panafricain pour la justice et l’égalité des peuples (Cojep). Ce parti fondé par Charles Blé Goudé, co-détenu de Gbagbo, s’est rendu, à Daoukro, mercredi 27 juin 2018, chez le leader du Pdci. La délégation conduite par le premier Secrétaire du Cojep, le professeur Nogbou Hyacinthe, a dit avoir « transmis au président du Pdci-Rda un message du leader du Cojep, Charles Blé Goudé, relatif à la situation socio-politique et à l’avenir de la Côte d’Ivoire ».

Sur le cas Guillaume Kigbafori Soro, il faut indiquer que chacun des ex-alliés (Ouattara et Bédié) voudrait l’avoir avec lui. Le leader du Rdr, qui a compris que son Vice-président chargé du Tchologo, s’est rapproché de Bédié, a cédé à la demande de libération de Koné Kamaraté Souleymane dit Soul To Soul, le Directeur du protocole du chef du Parlement ivoirien. C’est un geste d’apaisement d’Alassane Ouattara à l’endroit de son ex-dauphin constitutionnel. Bien que membre de la direction du Rdr, Guillaume Soro, dont la candidature pour la présidentielle de 2020 se précise, pourrait, le moment venu, faire un choix entre les camps Ouattara et Bédié.

Outre des bouts des partis alliés d’Alassane Ouattara, membres du Rhdp, Bédié est aujourd’hui proche de l’opposition significative -les deux Fpi- et d’autres mouvements politiques comme la coalition « Debout, sauvons la Côte d’Ivoire » du professeur Bamba Moriféré, par ailleurs président du Rassemblement du peuple de Côte d’Ivoire (Rpci). Et, depuis le mercredi 8 août 2018, date à laquelle le président du Pdci a annoncé officiellement son retrait du processus de mise en place du parti unifié, la probabilité pour que son camp affronte démocratiquement celui d’Alassane Ouattara s’est accrue. Ce d’autant plus que Bédié, dans son communiqué rendu public après une audience avec le numéro 1 ivoirien, s’est « réserv(é) le droit de promouvoir une plateforme de collaboration avec les Ivoiriens qui partagent sa vision d’une Côte d’Ivoire réconciliée et soucieuse des droits, des libertés et du bien-être de ses populations ».

SYLLA Arouna

abidjan.net

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