La mort du bébé d’une Tunisienne n’ayant pas pu accoucher faute de personnel soignant dans la ville du Kef, dans le Nord-Ouest, a causé beaucoup d’émoi depuis le 1er mai. Sans trouver un spécialiste dans les hôpitaux de la région, la jeune femme a été refusée par une clinique, faute d’argent pour un acompte. Elle a perdu son bébé et a dû subir une hystérectomie, car une hémorragie s’est enclenché faute de soins. Les députés du Kef ont alerté le président Kaïs Saïed de ce drame qui témoigne des problèmes du système de santé publique dans le pays.
C’est une affaire qui, presqu’une semaine après le drame, continue de secouer l’opinion publique. Deux mandats de dépôt ont été émis vendredi 5 mai : l’un à l’encontre du surveillant de l’hôpital régional du Kef, où la jeune femme n’avait pas pu être admise faute de spécialiste, l’autre à l’encontre de la clinique privée qui lui a refusé l’hospitalisation.
Une enquête judiciaire a été ouverte pour abstention délictueuse, un crime qui est puni de cinq ans d’emprisonnement. La justice tunisienne a mis les bouchées doubles sur ce drame, en mettant en garde à vue près d’une dizaine de personnes dès le lendemain.
Cette négligence fatale révèle surtout la dégradation du système de santé en Tunisie, problème récurrent dans plusieurs régions du pays, où les hôpitaux souffrent d’un manque de spécialistes et du désert médical. L’année dernière, dans la même région, une femme a accouché seule dans les toilettes de l’hôpital faute d’attention médicale. En 2015, plusieurs femmes étaient mortes pendant leur accouchement au sud de la Tunisie à cause du manque d’obstétriciens.
Les gynécologues sont également de moins en moins présents dans les hôpitaux régionaux. Depuis la révolution de 2011, la fuite des médecins vers l’étranger est ascendante : ces cinq dernières années, 3 300 compétences ont émigré pour de meilleures conditions de travail.