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Mali : des forces de sécurité russes signalées à Gao, après le retrait de l’armée française.

L’armée française a achevé le 15 août le retrait des derniers soldats de l’opération Barkhane, au Mali, dans un contexte de dégradation des relations entre Paris et Bamako. Au même moment, des membres des forces de sécurité russes ont été aperçues par des casques bleus, à l’aéroport de Gao, dans le nord du pays, où opère déjà le groupe paramilitaire russe Wagner.

La nature ayant horreur du vide, la Russie semble ne pas avoir attendu très longtemps pour avancer ses pions au Mali, où opère déjà le groupe paramilitaire russe Wagner. Des casques bleus allemands ont en effet observé, lundi 15 août, la présence de dizaines de membres des forces de sécurité russes à l’aéroport de Gao, dans le nord du pays, alors même que la France annonçait avoir achevé le retrait du Mali des derniers soldats Français du Barkhane , une opération militaire visant à lutter dans le Sahel contre les mouvements jihadistes.

Selon un document rédigé par le commandement de la Force de Défense fédérale allemande, daté de mardi et consulté par l’agence Reuters, des soldats allemands et britanniques appartenant à la Force de maintien de la paix de l’Organisation des Nations unies ont remarqué la présence de deux avions à l’aéroport de Gao, notamment un L-39 Albatros. 

“Deux heures plus tard, 20 ou 30 personnes vêtues d’uniformes n’appartenant pas à l’armée malienne ont été vues, déchargeant des équipements d’un avion malien”, indique le document. “Ils étaient très certainement des membres des forces de sécurité russes, le L-39 ayant vraisemblablement été piloté par des soldats russes, les forces maliennes n’étant pas en mesure de le faire”, est-il ajouté.

“Mille hommes mal équipés”

Mardi, le capitaine Yann, militaire français membre de la force Barkhane, a confirmé avoir croisé sur le terrain des mercenaires du groupe lors de patrouilles.

De son côté, Bamako dément la présence des mercenaires et évoque plutôt des “instructeurs” venus de Russie pour soutenir son armée, tandis que la Russie parle d’un contrat “commercial” entre Wagner et le Mali, sans lien avec Moscou. 

Selon Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali, près d’un millier de mercenaires appartenant à cette société seraient présents dans le pays. “Mille hommes mal équipés par rapport à l’armée française, sans force aérienne efficace ni de drone, qui ne peuvent pas résoudre un problème que les soldats français eux-mêmes ne parvenaient pas à contenir”, a-t-il indiqué.

Le diplomate a également insisté sur la présence contreproductive de Wagner. “Par sa brutalité, elle pousse finalement une partie des populations dans les bras des jihadistes, parce que celles-ci se sentent agressées par l’armée malienne épaulée par ces mercenaires russes, et c’est un vrai problème”. 

Un récent rapport d’experts missionnés par l’ONU, dévoilé par l’AFP le 5 août, a évoqué la présence de “soldats blancs” accompagnant les soldats maliens sur la scène de tueries, notamment à Robinet El Ataye, où 33 civils ont été tués en mars. “Ce sont des sociétés qui ne respectent aucune règle, comme on a pu le revoir dans l’affaire du charnier de Gossi, qu’ils ont monté à des fins de désinformation contre les forces françaises. Ils ne seront pas un point de stabilité dans la région”, a confié, mardi, le colonel Yves Gastine, commandant de la Force Barkhane à Gao.   

Les relations entre Bamako et Paris n’ont cessé de se détériorer depuis la prise de pouvoir de l’armée malienne, à la suite d’un coup d’État en 2020. Dernière illustration en date : le chef de la diplomatie malienne, Abdoulaye Diop, a réclamé mardi au Conseil de sécurité de l’ONU une réunion d’urgence sur la situation dans son pays. Le chef de la diplomatie accuse la France de fournir renseignements et armes aux terroristes.

Les autorités françaises n’ont pour le moment pas réagi à ces accusations. Interrogé à Niamey par notre envoyé spécial Cyril Payen, le chef de la force Barkhane a jugé ces accusations “insultantes” eu égard à la mémoire des 59 soldats français morts dans les combats menés contre les jihadistes au Sahel. Il a ajouté que la France se tiendrait à disposition du conseil de sécurité de l’ONU pour l’enquête.

Le ministère malien des Affaires étrangères a diffusé, mercredi, auprès de journalistes la lettre adressée par Abdoulaye Diop à la présidence en exercice chinoise du Conseil de sécurité. Le Mali “se réserve le droit de faire usage de la légitime défense” si les agissements français persistent, conformément à la charte des Nations unies, affirme le ministre.

Dans cette lettre, le ministre dénonce les “violations répétitives et fréquentes” de l’espace aérien national par les forces françaises et les vols d’appareils français se livrant à “des activités considérées comme de l’espionnage” et des tentatives “d’intimidation”. Les autorités maliennes disposent “de plusieurs éléments de preuve que ces violations flagrantes de l’espace aérien malien ont servi à la France pour collecter des renseignements au profit des groupes terroristes opérant dans le Sahel et pour leur larguer des armes et des munitions”, ajoute le texte.

   

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