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RDC: les grandes lignes des résultats provisoires.


Du matériel électoral entreposé dans un centre de la Céni congolaise à Kinshasa, le 3 janvier 2019.
© REUTERS/Baz Ratner

En RDC, le processus électoral est toujours aussi contesté. La coalition Lamuka qui a soutenu l’opposant Martin Fayulu à la présidentielle, a déposé ses recours dans la matinée de ce samedi 12 janvier, pour la présidentielle. Martin Fayulu, arrivé deuxième, revendique 61% des sièges. La Commission électorale (Céni) a fini, dans la nuit de vendredi à ce samedi,  par donner les résultats des élections législatives. Le président proclamé, Felix Tshisekedi, aurait moins d’une cinquantaine de sièges, Lamuka aurait moins d’une centaine sièges et le Front commun pour le Congo (FCC), coalition au pouvoir, revendique, elle, une majorité absolue.

Le Front commun pour le Congo, coalition qui rassemble les partis pro-Kabila, a revendiqué entre 250 et 300 députés. Ce serait un peu moins qu’en 2011. Cependant, il est extrêmement difficile de faire la filiation de tous les regroupements politiques et les candidats et c’est aussi l’une des particularités de l’ère Kabila. Les partis s’effacent derrière des regroupements, reconfigurables à souhait après les élections et c’est ce qui explique que le décompte soit difficile à faire.

Dans le détail, le PPRD, parti présidentiel, devrait perdre quelques sièges par rapport aux précédentes élections. C’est donc grâce à ses alliés que le FCC revendique, aujourd’hui, la majorité absolue.

Evidemment, dans les rangs de l’opposition, de la société civile, comme chez les observateurs, on s’étonne de ce score très élevé. La coalition qui détient le moins de voix à la présidentielle (4 millions pour son candidat Emmanuel Ramazani Shadary) raflerait 70 % des sièges ou même plus.

Quant aux coalitions de l’opposition, Cach et Lamuka, elles se retrouvent largement minoritaires tout en ayant recueilli plus de de 70 % des suffrages à la présidentielle. En effet, selon le premier décompte de Cach, la coalition de Félix Tshisekedi, l’UDPS, a au moins 31 députés et pour l’UNC et alliés de Vital Kamerhe, 18 députés. On se dit déjà prêt à introduire des recours. La coalition Lamuka qui revendique 61 % des voix à la présidentielle pour Martin Fayulu, pourrait ainsi devenir la deuxième force politique à l’Assemblée, tout en totalisant moins d’une centaine de sièges.

Recours et négociations

Joint par RFI, Thotho Mabiku, l’un des conseillers de Félix Tshisekedi, commente ces résultats. « C’est un peu un sentiment de déception. Nous trouvons que c’est vraiment très peu de députés pour notre coalition mais pour nous, le plus important, pour le moment, c’est que nous avons l’alternance, un nouveau président élu », a-t-il déclaré.

A la question de savoir s’ils vont avoir un contrôle effectif des institutions quand ils n’ont la majorité nulle part – à moins de rentrer dans la majorité, c’est-à-dire au sein du FCC – et qu’ils n’auront pas le Premier ministre qui contresigne l’essentiel des décisions du président, Thotho Mabiku répond que « la stratégie, nous laissons cela au président de la République ». « Nous croyons que les jours qui viennent seront très déterminants », souligne-t-il avant d’ajouter qu’ils ne rejettent pas les résultats.

« Nous prenons d’abord acte de ce qu’il y a mais les recours ne manqueront pas parce qu’il y a des coins où nous estimons que nous aurions pu gagner. Or, les résultats que nous voyons sont autres », précise Thotho Mabiku, conseiller de Felix Tshisekedi.

Ainsi, du côté de Cach, on réfléchit déjà à une stratégie qui passera nécessairement par la case Cour de justice mais aussi par des négociations notamment avec le FCC. En effet, avec 49 sièges à l’Assemblée, Cach ne peut pas revendiquer la primature et ne peut donc former un gouvernement.

Le FCC va-t-il leur accorder certains ministères ? Ce que propose, aujourd’hui, le docteur Kodjo Ndukuma, du FCC, à Cach, c’est d’intégrer une nouvelle majorité au pouvoir ou bien d’entrer dans une phase de cohabition. Cach, de son côté, pense qu’avec son poste de président, Felix Tshisekedi aura une influence sur les autres institutions.

« Une vaste blague »

Martin Fayulu de son côté, avec la Dynamique de l’opposition, sa coalition, n’était même pas sûr, ce samedi matin, d’avoir un groupe parlementaire. Lamuka est encore en train de faire les comptes mais ils auraient moins d’une centaine de députés, ce qui en ferait, si les résultats se confirment, la deuxième forme politique à l’Assemblée. C’est notamment la plateforme électorale de Moïse Katumbi qui obtient le plus de sièges. C’est aussi celle qui présentait le plus de candidats de toute l’opposition.

« C’est de la vaste blague. Monsieur Kabila s’est donné les deux tiers de l’Assemblée nationale parce qu’il pense, demain, avec sa coalition bidon, changer la Constitution. Et vous comprenez, comme je le disais, tout est cousu de fil blanc. Monsieur Kabila pense avoir trouvé quelqu’un qui va pérenniser son pouvoir. Le peuple congolais ne le laissera jamais faire cela. C’est pour cela que nous demandons le recomptage de toutes les voix sur toutes les élections, sur les trois élections : présidentielle, législatives nationales et législatives provinciales. Il faut recompter les voix. Et si monsieur Kabila et ses acolytes pensent liquider le Congo, nous, on ne le laissera pas », a déclaré, sur RFI, Martin Fayulu.

Implications institutionnelles

La victoire annoncée du FCC aux législatives pourrait avoir également des implications institutionnelles. C’est ce que redoutent les opposants à Joseph Kabila car les députés de la majorité pourront réformer la Constitution. Mais il faut attendre que tous ces résultats soient confirmés.

Il y a des périodes de recours qui s’ouvrent et qui pourront durer plus de deux mois. A partir de là, quand les assemblées seront figées et si ces tendances se confirment, le FCC devrait avoir la majorité des sénateurs. Ce qui pourrait offrir à Joseph Kabila la possibilité de venir président du Sénat, c’est-à-dire deuxième personnage de l’Etat et qui, éventuellement, s’il arrivait quelque chose au président – s’il était par exemple empêché – pourrait prendre la tête des institutions.

D’autre part, les experts électoraux observent qu’avec toutes ces forces politiques et avec cette répartition des sièges, si elle se confirme, le FCC pourra effectivement avoir suffisamment de sièges à l’Assemblée pour changer la Constitution et pour permettre un rééquilibrage des pouvoirs entre celui éventuellement du président et ceux du gouvernement des autres Assemblées.

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