Le président sénégalais, Malick Sall, a remis en liberté Karim Wade, le fils de son prédécesseur à la tête de l’Etat, Abdoulaye Wade.
Condamné à 6 ans d’emprisonnement suite à un procès pour enrichissement illicite, Karim a recouvré la liberté le vendredi 24 juin 2016, conformément à promesse faite, quelques jours plus tôt, par Malick Sall.
Cette libération du fils de l’ex-président sénégalais, intervenue plus tôt que prévue, sonne comme un geste de décrispation sociopolitique, dans ce pays où l’affaire Karim Wade était visiblement en train de pourrir le climat politique. En effet, depuis qu’il a été arrêté et jeté en prison après un procès pour enrichissement illicite, les partisans du Parti démocratique sénégalais (Pds) ne cessent de réclamer sa libération. Ils ne rataient aucune occasion de se faire bruyamment entendre, notamment durant toute la durée du procès.
Pour ne rien arranger, le père de Karim, Me Aboulaye Wade, a dû faire son come-back sur la scène politique pour prendre la tête de la bataille pour la libération de son fils ; alourdissant un peu plus l’atmosphère au pays de la Téranga. C’est pour désamorcer cette « bombe », qui menaçait de déstabiliser la fin de son mandat, que Macky Sall a ouvert les portes de la prison où Karim Wade purgeait sa peine.
Le faisant, le président sénégalais pose là un geste fort, qui ne fait pas que des heureux. Aussi l’ex-« ministre du ciel et de la terre » a-t-il été libéré sans bruit, presque en catimini. Direction : le Quatar. L’acte posé par Malick Sall devrait inspirer son homologue ivoirien, Alassane Ouattara. Il faut espérer qu’il imite l’exemple de son “collègue” en posant lui aussi un acte similaire, susceptible de booster le rapprochement avec le camp de l’ancien président Laurent Gbagbo.
Afin de décrisper le climat sociopolitique, il pourrait ouvrir les portes de la prison à des figures de proue de l’ancien régime, qui y croupissent pour une raison ou une autre. Des prisonniers de la trempe de Karim Wade, comme Assoa Adou, Hubert Oulaye, Lida Kouassi ou même Simone Gbagbo pourraient recouvrer la liberté. Un tel signal fort devrait soulager les cœurs encore chargés de nombre de partisans de l’ancien chef de l’Etat, aujourd’hui détenu à La Haye. Cela devrait contribuer, significativement, à briser le mur de défiance entre ceux-ci et les pro-Ouattara et partant consolider davantage la cohésion nationale. D’autant que des barons de l’ancien parti au pouvoir, le Front populaire ivoirien (Fpi), n’attendent que ce genre d’acte pour faire un pas sur le chemin de la réconciliation.
Certes, le besoin de réconciliation n’exclut pas l’impératif de justice, pour tenir compte des attentes des victimes, comme le veut la justice transitionnelle. Ce qui explique que le président Ouattara n’entend pas transiger sur la nécessité de traduire devant les tribunaux tous ceux qui sont soupçonnés d’avoir posé des actes répréhensibles durant la crise post-électorale. Comme pour leur faire payer ces exactions et autres crimes.
A l’instar de la peine infligée à Karim Wade, au terme d’un procès mouvementé. Il faut, toutefois, espérer qu’après que la justice aura joué sa partition, le chef de l’Etat entrera en scène. C’est en imitant l’exemple de son homologue sénégalais qu’il fera déplacer la montagne de méfiance qui se dresse aujourd’hui encore, entre lui et les partisans de Gbagbo. C’est par de tels sacrifices qu’il pourra gagner le défi de la réconciliation vraie.
Ouattara doit le faire, sans calcul politique, comme l’a fait Malick Sall, au risque de s’exposer à une redoutable candidature de Karim Wade à la prochaine élection présidentielle.
Assane NIADA
linfodrome.com