Un missile Scalp.

Le président français Emmanuel Macron a annoncé mardi 11 juillet, au premier jour du sommet de l’Otan, que la France allait livrer des missiles longue portée Scalp à l’Ukraine. Après Londres, Paris à son tour cède des armements sensibles qui vont doter les forces ukrainiennes d’une capacité de frappe de profondeur.

Dans une guerre dont le front ces derniers mois est resté stable en dépit des efforts offensifs récents, le Scalp est un indéniable atout pour l’Ukraine. Ces missiles de croisière d’une portée de 250 km vont permettre à Kiev de frapper les arrières russes, les lignes logistiques et surtout les centre de commandement.

Tiré depuis un avion, le Scalp vole très vite et très bas. Il est invisible au radar jusqu’à la phase finale, le « Pop up ». Il s’agit d’une manœuvre en cloche qui permet au missile de pénétrer à la verticale sur sa cible avec une précision métrique.

« Porter le fer et le feu bien au-delà des frontières ukrainiennes »

C’est une arme conçue pour décapiter un centre de commandement durcit et profondément enterré, pointe un officier français de l’armée de l’air. Ces missiles de croisière, dans les mains ukrainiennes, vont pouvoir frapper des cibles de haute valeur loin de la ligne de front, sans craindre la défense aérienne russe.

Pour les spécialistes, le Scalp représente un saut qualitatif. Un saut qualitatif dangereux, insiste un haut gradé, qui estime que faire croire que le missile est pour tirer sur les zones de combat est du « pipeau ». Et d’ajouter : « Le Scalp est taillé pour porter le fer et le feu bien au-delà des frontières ukrainiennes ». Mais les missiles Scalp seront livrés « en gardant la clarté, la cohérence de notre doctrine, c’est-à-dire permettre à l’Ukraine de défendre son territoire », a rappelé mardi Emmanuel Macron, excluant ainsi implicitement toute utilisation pour frapper la Russie.

Rien « du point de vue du droit international » n’empêche l’Ukraine « de frapper le territoire russe, notamment pour des infrastructures qui qui participent à l’effort de guerre »

Paris, tout comme Londres avant, livre ce même type d’engins en insistant sur le fait qu’ils devaient avant tout servir à repousser les forces russes occupant l’Ukraine. Le président français a aussi souligné mardi que Kiev devait en faire un usage défensif et donc ne pas frapper le territoire russe.

Mais pour Yohann Michel, chercheur à l’International Institute for Strategic Studies, rien du point de vue du droit n’empêche Kiev de frapper le territoire russe, et si la France voudrait imposer une telle clause, cela se reposerait seulement sur « de la confiance ».

Selon une source militaire française à l’AFP, les Scalp sont d’ailleurs déjà sur le terrain. Ils « ont été livrés en même temps que notre président l’annonçait », a précisé cette source en marge du sommet de l’Otan à Vilnius.

« Une décision entachée d’erreur »

De son côté, Moscou a estimé que la livraison à l’Ukraine de missiles à longue portée par la France était « une décision entachée d’erreur et lourde de conséquences pour la partie ukrainienne ». La Russie a annoncé qu’elle prendrait des contre-mesures dans le cadre du conflit actuel. Ce geste de soutien de la France laissera probablement des traces profondes dans la relation entre Paris et Moscou qui ne cesse de se détériorer depuis le début de la guerre.

Concernant l’entrée de la Suède dans l’Otan, le porte-parole du Kremlin a fait le constat suivant : jamais l’infrastructure militaire russe ne s’est déplacée vers l’Europe occidentale, il y a toujours eu un mouvement dans le sens inverse. « Si les européens ne comprennent pas cette erreur, alors, bien sûr, c’est regrettable », a encore déploré Dmitri Peskov.

Dans ces conditions, on ne peut que présager de la poursuite de l’escalade. Moscou l’a d’ailleurs fait savoir il y a quelques mois, à propos de la Finlande, mais aussi de la Suède. Les nouveaux membres du bloc hostile deviendront une cible légitime pour les représailles russes, y compris sur le plan militaire.