Choriste des «Djély’S» de Tiken Jah Fakoly, Julie Brou sort de l’ombre. Avec son premier disque qui vient d’être mis sur le marché, elle veut frapper un grand coup. Sans quitter Tiken Jah.
Depuis toute petite, Julie Brou baigne dans la musique. D’abord, en tant que danseuse. Puis, quelques années après, elle se lance dans la chanson. Elle devient choriste et bosse dans de nombreux studios du bord de la lagune ébrié. La voix de Julie accompagne plusieurs noms de la musique ivoirienne dont Les Salopards, Ismaël ISAAC, Tiken Jah Fakoly, entre autres. C’est d’ailleurs avec le descendant des Fakoly, qu’en 2005, elle s’installe en France. La qualité de sa voix et son professionnalisme font d’elle une des choristes les plus demandées à Paris. On la voit travailler avec Manu Tchao, Bernard Lavilliers et bien d’autres.
Aujourd’hui, enrichie de ses expériences aux côtés des grands noms de la musique, la ’’petite’’ de Willy a décidé de s’exprimer en solo en réalisant son album à elle : «Ika na kassi» (Ne pleure pas), son tout premier disque.
Entretien.
- Bonjour Julie. On sait que tu as été danseuse, mais on ne sait pas comment est arrivée ton aventure musicale …
– C’est vrai, j’ai été danseuse à Variétoscope. C’était avec un groupe de Gagnoa. Mais bon, on a été dernier (éclat de rire). Nous avons été éliminés très tôt, au stade des présélections. Et après, fait Podium avec le groupe Kencia de Cocody, puis Abousouan Air de Grand-Bassam. Malheureusement, là encore, on a été dernier (Rires aux éclats). Ensuite, j’ai commencé à faire des chœurs dans des groupes de quartier. Les gens m’ont encouragée à en faire un métier. J’ai intégré le groupe de Tangara Speed Godha. Après, j’ai bossé avec Ismaël ISAAC, Kadjeem, Tiken Jah…
- Tu n’as donc pas commencé par les studios ?
– Si ! Si ! J’ai commencé avec le tonton feu Wompi qui m’a donné la chance de faire mes premiers chœurs en studio sur l’album de AS Bingui, Feelingué… On me donnait 80 000 F CFA pour la séance. Je me suis rendu compte que je pouvais gagner de l’argent en faisant les chœurs. C’est comme ça que tout est parti. Et par la grâce de Dieu, Tiken Jah m’a fait venir en France pour une tournée. Il a demandé à son tourneur GARANCE PRODUCTION qui m’a envoyé un contrat de travail pour rejoindre les choristes qui étaient déjà en France. J’ai beaucoup tourné avec Tiken en Afrique, il a donc convaincu ses tourneurs de me faire venir.
- Et tu as décidé de caler ici à Paris ?
– Je te vois venir ! Ce n’est pas ‘’caler’’ comme certains artistes qui arrivent ici et font en «Kallet Biali» (Ne plus retourner en Afrique : ndlr). Après la première tournée, d’autres tournées ont suivi; et ça s’enchaînait. A chaque fois, il fallait faire les mêmes démarches administratives pour le visa, etc. Par la grâce de Dieu, j’ai rencontré mon mari et cela m’a facilité les choses pour le titre de séjour. J’ai donc décidé de rester en France. Je pouvais ainsi continuer mes tournées et mon travail de choriste.
- Donc tu restes finalement avec l’orchestre les ‘’Djély’S’’ de Tiken ?
– Oui, je suis avec l’orchestre de Tiken. Normal ! C’est pour ça que je suis restée en France. C’est lui ma priorité. Lorsqu’il y a des propositions de concert, c’est lui d’abord, les autres viennent après. En fait, j’accepte les autres propositions en fonction du planning de Tiken.
- Je vois que ça se passe bien avec Tiken. Alors d’où est venu le désir de se mettre au-devant de la scène en réalisant un disque en solo ?
– Tu sais, je suis choriste de métier. Le désir de s’affirmer en solo vient tout seul. On a vu Aïcha Koné, Chantal Taïba, Awa Maïga et autres, la liste est longue. Elles étaient choristes et, à un moment, elles se sont affirmées en solo. Ce sont des choses qui arrivent naturellement dans notre carrière de chanteuse. C’est ainsi que j’ai décidé de sortir cet EP. Un maxi single «Ika na kassi».
- Il y a beaucoup de collaborations sur ce disque. Avec, par exemple, Soum Bill dans la chanson «Figniètô» .
– Oui, Soum Bill est un grand frère avec qui j’ai travaillé à l’époque des Salopards, en concert comme en studio. C’est Abdraman Cissé, le frère d’Hamed Farras, qui a écrit les paroles et Soum y a apporté une touche avec son feeling de chant ; et l’arrangeur Dave Kynner a repris les arrangements. Cette chanson, c’est l’histoire d’un aveugle qui rêve d’avoir une vie normale et d’être considéré comme tout le monde. Ici, j’ai été choqué par le fait qu’on aille déposer les vieillards dans les maisons de retraite. C’est pas le cas chez nous en Afrique où ton parent, quel que soit son âge avancé, ou son handicap, il reste ton parent. Et il vit avec toi.
- Il n’y pas que Soum Bill ?
– Bien sûr ! Comme je viens de te le dire, ce disque a été entièrement arrangé par Dave Kynner qui est le clavier et le chef d’orchestre de Tiken. Il y a eu aussi les interventions de Christian Mahilet, clavier de Magic System, Vieux Briscard, Ludo Nhole, Michel Pinheiro, Valess Assouen et autres. Ce sont tous de grands requins incontournables sur la place parisienne. C’est un casting des meilleurs que j’ai eu la chance d’avoir sur ce maxi single.
- A présent que ce premier disque est sorti, comment te sens-tu ? Soulagée ?
– C’est plutôt un sentiment de crainte qui m’anime. Est-ce que les gens vont apprécier le produit comme ils m’apprécient pendant les concerts ? Est-ce que j’ai bien chanté ? Mais bon, si tu veux aussi te poser plusieurs questions avant, tu ne sortiras jamais ton album. Donc, tu te lances et le public jugera…
- Ton métier fait que tu es tout le temps entre deux avions. Ça n’a certainement pas été facile de réaliser ce disque ?
– J’avais déjà certaines chansons depuis 2006. Elles ont été écrites pendant les tournées, petit à petit. Disons que c’est un maxi single des tournées, il a été conçu pendant nos moments de pause.
- Et lorsque tu as décidé de le sortir, tu en as parlé à Tiken Jah ?
– Oui. Il a été le premier à écouter la chanson «Ika na kassi». Il a apprécié et m’a encouragée dans ma démarche artistique en me donnant sa bénédiction.
Et puis cela ne lui posait aucun problème dans la mesure où je ne quittais pas le groupe à cause de la sortie de mon album. Je reste toujours membre des ‘’Djély’S’’. Nous avons, comme je l’ai dit, un planning ; donc ce sont mes temps libres que je mets à profit pour la promo de cet EP. Ce n’est pas parce que j’ai un album que je vais cesser de faire les chœurs. On meurt ensemble Tiken et moi.
- Lorsque j’ai appris que tu sortais ton album, je m’attendais à du Reggae, puisque tu évolues dans cet univers. Pourquoi le choix de la variété ?
– J’aime le reggae, j’aime la variété. Là, c’est pas encore l’Album, c’est le maxi single. Qui te dit qu’il n’y aura pas de reggae sur l’album proprement ? Attention ! De toutes les façons, je suis une choriste de métier, donc je joue dans tous les registres.