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Coopération Russie-Côte d’Ivoire: M. Henri Doué Tai, le président de la Chambre de commerce et d’industrie ivoire-russe,donne son avis

Pour M. Henri Doué Tai, le président de la Chambre de commerce et d’industrie ivoro-russe, la Russie doit avoir une politique commerciale plus audacieuse en Afrique
Créée depuis deux ans, la Chambre de commerce et d’industrie ivoiro-russe (Cirus) s’active à promouvoir les échanges entre la Russie et la Côte d’Ivoire. Son président parle des domaines qui peuvent intéresser les hommes d’affaires des deux pays.

M. Henri Doué Tai, depuis quand la Chambre existe et quels sont les objectifs que vous lui assignez ?

Henri Doué Tai : La Chambre de commerce ivoiro-russe a été créée le 7 mai 2016. Elle a pour but de favoriser les échanges économiques et commerciaux entre la Côte d’Ivoire et la Russie et d’ouvrir la Côte d’Ivoire à la Russie et vice versa.

Les échanges commerciaux entre la Côte d’Ivoire et la Russie sont très faibles. Comment la Chambre compte-t-elle les accroître?

En effet les échanges entre les deux pays sont peu importants, et c’est la raison pour laquelle cette chambre a été créée. Au plan étatique, les relations commerciales sont très faibles. Mais les hommes d’affaires russes s’intéressent de plus en plus à la Côte d’Ivoire. C’est pour cela que j’estime qu’il est bon que nous prenions les devants pour créer l’axe Abidjan-Moscou.

Depuis deux ans que cette chambre existe, quelles sont les actions concrètes qu’elle a menées pour booster ces relations ?

Lorsque la Chambre a été créée en 2016, il fallait d’abord la faire connaître aux autorités. Nous l’avons présentée au ministre du Commerce, au ministre de la Défense, au patronat, à la Chambre de commerce et d’industrie, à la Chambre d’agriculture, à la Chambre des métiers et à l’Assemblée nationale. C’est une chambre privée qui est indépendante des structures étatiques, dont le fonctionnement dépend des cotisations de ses membres.

Pour être à la tête de cette chambre, connaissiez-vous la Russie avant, y aviez-vous des intérêts?

Lorsque j’étais plus jeune, je m’intéressais beaucoup à l’ ex-Urss. Et après la Perestroïka et la création de la Fédération de Russie, je m’y intéressais davantage. Je suis allé trois fois en Russie, avant de créer cette chambre. J’y étais pour mes affaires personnelles, je suis dans le pétrole. J’ai constaté que ce pays avait d’énormes potentialités qui peuvent être utiles, non seulement à la Côte d’Ivoire, mais aussi à toute l’Afrique. Je me suis demandé pourquoi alors la Côte d’Ivoire n’a pas de relations commerciales fortes avec la Russie.

Depuis que la Chambre a vu le jour, les échanges entre les deux pays ont évolué positivement, dites-vous. Y a-t-il eu déjà des échanges entre des hommes d’affaires des deux pays?

Nous avons invité le président du patronat ivoirien, M. Jean-Marie Acka, à se rendre en Russie en mai 2018, mais le ministre des Affaires étrangères a voulu que cette visite se fasse dans le cadre d’un voyage officiel qu’il effectuera prochainement à l’invitation de son homologue russe. Les hommes d’affaires pourront ainsi faire partie de la délégation. Nous, membres de la Chambre, avons émis le souhait de rencontrer le ministre des Affaires étrangères, mais depuis deux ans, nous attendons cette audience.

Au niveau des échanges, quels sont les domaines qui pourraient intéresser les hommes d’affaires des deux pays ?

Le cacao ivoirien pourrait sans aucun doute intéresser la Russie, qui pourrait le transformer sur place en Côte d’Ivoire au lieu de l’importer brut. Au plan santé, la médecine en Russie est très développée et pourrait intéresser les Ivoiriens. Les mines, également, constituent un secteur intéressant pour les opérateurs des deux pays. N’oublions pas le domaine militaire, où la Russie a développé une puissante industrie d’armement.

Abidjan n’a pas de liaison directe avec Moscou, ne pensez-vous pas que cela constitue un obstacle au développement des échanges ?

La Russie n’est pas un pays plus lointain de la Côte d’Ivoire par rapport à la Chine, mais les Ivoiriens vont régulièrement en Chine ! Nous allons œuvrer pour la création de ces liaisons directes entre les deux pays. Un pays comme le Maroc, qui investit beaucoup en Côte d’Ivoire, a des relations commerciales importantes avec la Russie. Cela grâce aux liaisons aériennes. De Casablanca, vous pouvez aller en Russie sans problème. Les hommes d’affaires et les touristes russes visitent régulièrement le royaume. Les Marocains n’ont pas besoin de visa pour aller en Russie et vice versa. Je souhaite que la Côte d’Ivoire et la Russie offrent aussi ces facilités à leurs hommes d’affaires. De 2016 à 2018, j’ai tout fait pour qu’au forum économique de Saint-Pétersbourg en Russie, la Côte d’Ivoire soit présente. Mais aucune autorité ivoirienne, aucun opérateur économique ivoirien, n’a répondu présent à ce forum. Pourtant de nombreux pays africains y étaient. Je m’interroge sur l’absence de la Côte d’Ivoire !

Pourquoi cette réticence des hommes d’affaires ivoiriens à l’égard de la Russie ?

La responsabilité de cette réticence est partagée. Les représentations diplomatiques russes en Afrique doivent faire une politique commerciale plus audacieuse, je dirai même ”agressive”, comme le font leurs concurrents chinois, marocains, turcs et autres. Ces ambassades russes n’organisent pas souvent des voyages, des conférences et d’autres activités pour mieux faire connaître les immenses potentialités de ce grand pays. C’est ce que je conseille à nos amis russes. Les autorités ivoiriennes aussi doivent en faire de même.

Que fait la Chambre, pour faire connaître la Russie aux Ivoiriens et la Côte d’Ivoire aux Russes ?

C’est justement ce que je fais à travers cette interview

Mais ce n’est pas tôt, la Chambre existe depuis deux ans!

Bien sûr, mais il fallait d’abord la faire connaître aux autorités ivoiriennes. Ensuite, organiser une journée de la Russie en Côte d’Ivoire. Pour le salon du cacao qui doit se tenir en octobre 2018, je suis en train d’organiser la venue d’opérateurs économiques russes. Nous allons lentement, mais sûrement.

La langue ne constitue-t-elle pas un autre obstacle au développement de ces échanges?

Les Chinois parlent-ils français et les Ivoiriens, chinois ? Pourtant les échanges existent entre les deux pays ! Les étudiants ivoiriens formés en Russie, qui parlent couramment russe, que font-ils pour développer ces relations ? Rien du tout, hélas, et je le déplore. Ce sont eux qui doivent être les premiers à faire connaître la Russie à leurs concitoyens ; ils doivent jouer le rôle d’ambassadeurs de la Russie en Côte d’Ivoire.

Vous venez de la Crimée, où vous avez pris part en avril dernier à la 4e conférence économique de Yalta. De quoi a-t-il été question ?

Je voudrais préciser que je devrais également prendre part à l’édition de 2017. Mais les médias occidentaux ont mené une campagne dissuasive contre la Crimée. Ils ont affirmé que le pays est en guerre, qu’il est envahi par l’armée russe et ses chars, que la population meurt de faim… Malgré cette campagne, j’ai décidé cette année d’y aller pour constater de visu ce qui se passe exactement. J’ai été agréablement surpris de découvrir un pays fabuleux. A l’aéroport de Simferopol, déjà, nous étions convaincus d’avoir foulé le sol d’un grand pays. L’aéroport d’un pays en constitue la vitrine Lorsqu’on y débarque, on a une certaine idée du pays qu’on visite. De l’aéroport à la ville de Yalta, le trajet fait deux heures. Mais c’est extraordinaire, ce qu’il m’a été donné de voir ! Par contre je n’ai vu ni soldats, ni chars.

Après tout ce que vous avez découvert en Russie, quel appel aimeriez-vous lancer aux Ivoiriens et aux autorités?

Je souhaiterais vivement une visite officielle du président ivoirien en Russie et du président russe en Côte d’Ivoire. Je suis persuadé que ce sera un déclic pour le développement des relations politiques, économiques et commerciales entre les deux pays. Nous avons aussi un grand projet : organiser un voyage en Russie pour les Ivoiriens et un séjour des Russes en Côte d’Ivoire.

 

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