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Scandale des véhicules non dédouanés : Des graves révélations exclusives

Le scandale des véhicules non dédouanés au Guichet unique automobile (Gua) n’a pas encore fini de livrer tous ses secrets…

L’affaire fait grand bruit depuis qu’elle a été révélée, le 24 avril 2018, par le journal L’éléphant déchaîné. Il ne se passe pratiquement plus de semaines, sans que de nouveaux éléments ne viennent élucider ce scandale de véhicules non dédouanés au Guichet unique automobile (Gua). Déjà, une vingtaine de personnes soupçonnées d’être parties liées à cette immense fraude ont été arrêtées et transférées à la Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan (Maca).

Selon nos sources, la contre-performance du bureau des douanes du Gua a été remarquée, depuis plusieurs mois, par la Direction générale des douanes. A preuve, cela a été au cœur des préoccupations majeures du séminaire bilan qu’elle a organisé, du 22 au 27 janvier 2018, à la Maison de l’entreprise au Plateau. Elle a alors instruit ses services de mener une étude sur le dédouanement des véhicules sur la plateforme du Gua. Et, cette étude a révélé de graves incohérences (Voir encadré) dans les données recueillies dans le Système de dédouanement automatisé des marchandises (Sydam).

Par courrier en date du 26 février 2018, le Directeur général (Dg) des douanes, le colonel-major Da Pierre, a informé son homologue de la Société ivoirienne de contrôles techniques automobiles et industriels (Sicta) d’irrégularités après la confrontation des données de leurs deux structures, l’invitant à plus de collaboration. Certaines sources indiquent que le courrier du Dg des douanes est resté sans suite, quand d’autres soutiennent le contraire.Toujours est-il que la Direction générale des douanes va poursuivre ses investigations. Elle va procéder à des recoupements avec le système informatique de Côte d’Ivoire logistique (Cil), concessionnaire de la plateforme du Gua.

Les résultats de ce croisement ont débouché sur « la découverte d’un courant de fraude portant sur l’immatriculation des Véhicules neufs particuliers (Vn) ». La Direction générale des douanes va alors ouvrir une enquête de terrain.Selon une autre source introduite à la Douane, l’Inspecteur général des douanes, saisi le 11 avril 2018 par la Directrice des services douaniers du port et des services spéciaux (Dsdpss), diligente une mission d’investigation sur le terrain au Gua le 12 avril. Par ordre de mission n° 148/Dgd/Igd/Igad du 12 avril 2018, il envoie donc une équipe de la Division d’investigation de l’Inspection générale sur les lieux. Cette équipe va mener ses activités d’investigation sur la plateforme du Gua du 12 au 16 avril 2018.

Au terme de ses investigations, des convocations sont adressées aux structures publiques et privées ainsi qu’aux personnels exerçant sur la plateforme en vue de les entendre relativement aux irrégularités constatées sur l’immatriculation des Vn. Il s’agit de Cil, du Gua, de Quipux Afrique-Côte d’Ivoire, du bureau des douanes du Gua, de 2GE et du ministère du commerce.Et, c’est cette pression des hommes du colonel-major Da Pierre, confie une source proche du dossier, qui aurait fait fuiter les informations.

Par ailleurs, il nous est revenu que la Directrice de Cil, Sylvie Niamoutié, aurait, elle aussi, porté plainte le 11 avril 2018. Mais cette date est contestée par une source proche des enquêteurs en charge du dossier qui évoquent plutôt le 19 avril 2018. « En réalité, elle n’aurait adressé des demandes d’explications à ses agents que les 16 et 17 avril 2018. Et ceux-ci auraient répondu les 17 et 18 avril au moment où se déroulaient les auditions à l’Inspection générale des douanes », informe cette source. Vrai ou faux, la Justice pour faire l’éclairage à ce niveau.

Deux importants communiqués. Pour préserver les intérêts du Trésor public, un dispositif a été bâti autour la Direction des enquêtes douanières en vue de procéder au recouvrement du manque à gagner. Ce dispositif a d’ailleurs fait l’objet de deux importants communiqués datés du mardi 15 mai 2018. Ils ont été signés par le Dg des douanes, le colonel-major Da Pierre lui-même.

L’un invitait les usagers, qui ont immatriculé leurs véhicules importés sur la période du 1er janvier 2016 au 30 mars 2018, à vérifier leur statut sur le lien www.douanes.ci/vehicules. « Cette vérification s’effectue à partir du numéro de châssis indiqué sur la carte grise. A l’issue de la vérification, les usagers pour lesquels le message affiché est « châssis retrouvé dans la liste des véhicules non dédouanés», sont invités à s’adresser à la Direction des enquêtes douanières sise au Plateau (…) pour procéder aux formalités de régularisation», indique le communiqué. « Les usagers se présentant spontanément au service des douanes avant le 30 juin 2018 acquitteront les droits et taxes de douane éludés et disposeront de leur véhicule, sans paiement d’amendes. A partir du 1er juillet 2018, les brigades des douanes, en patrouille sur toute l’étendue du territoire national, seront chargées de rechercher tous les véhicules en situation irrégulière. Les véhicules saisis donneront lieu au paiement des droits et taxes de douane éludés et aux suites contentieuses prévues par la législation en vigueur (paiement d’amendes, poursuites judiciaires)», précise-t-il.

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L’autre communiqué annonçait que l’agrément de commissionnaires en douane de 5 sociétés a été suspendu.

Dans sa parution du mardi 22 au lundi 28 mai 2018, L’éléphant déchaîné donnait de nouveaux éléments, soulignant que de la période du 1er janvier 201- au 30 mars 2018, ce sont 1 300 véhicules neufs et 9 580 véhicules usagers qui ont été immatriculés de façon irrégulière et sortis du Gua. Le journal a même fourni des noms de personnes figurant sur cette liste. On y retrouve des noms emblématiques comme ceux de hauts responsables politiques, de religieux, d’artiste…

En conférence de presse, jeudi 3 mai 2018, au Plateau, le procureur de la République, Richard Adou, donnait quelques informations. « Sous réserve du secret d’instruction, il a été découvert qu’il a été mis en place un mécanisme frauduleux pour contourner la Douane. Autrement dit, l’argent qui devrait servir à renflouer les caisses de l’État s’est malencontreusement retrouvé dans les poches ou dans les comptes bancaires de certaines personnes qui animent les structures tant étatiques que privées ou semi-privées », dénonçait-il. Pour sûr, cette affaire réserve encore bien de révélations et autres surprises.

Le Directeur général (Dg) des douanes, le colonel-major Da Pierre, a adressé une correspondance, le 26 février 2018, au Dg de la Sicta. Dans le courrier, il l’informait que ses services ont mis en place un cadre d’échanges de données depuis plus d’un an. Et que ces échanges permettent de rapprocher les données des immatriculations de la Sicta et celles des déclarations en douanes levées, couvrant les véhicules concernés. « Je voudrais me féliciter de cette initiative et souhaiter que ce cadre d’échanges soit renforcé par des séances pratiques d’analyses des résultats tous les trimestres. Ces séances d’analyses pourront prendre fin dès que l’ensemble des projets en cours seront finalises et garantiront une excellente sécurisation de tout le processus de dédouanement et d’immatriculation des véhicules », écrivait-il au Dg de la Sicta dont les services ont réceptionné le courrier le lendemain 27 février 2018.

« En ce qui concerne l’analyse portant sur les immatriculations faites depuis le 1er janvier 2016, je voudrais partager avec vous les résultats et, par la même occasion recueillir vos impressions », demandait-il.

Concernant les véhicules neufs, les travaux ont révélé que sur un total de 10 536, 193 ont été immatriculés sans aucune déclaration portant sur le châssis.

Les traces de 381 sur un échantillonnage de 10 536 véhicules neufs ont été retrouvées comme étant immatriculés avec des châssis en IM7 (Suspension des droits et taxes-Marchandise destinée à entrer en entrepôt chez un concessionnaire par exemple), entrepôts sans aucune déclaration de mise en consommation IM4 (Marchandise mise à la consommation-Tous les droits et taxes ont été payés) portant sur le châssis. Les immatriculations ne sont pas des IT/CD/MD signifient respectivement Immatriculation temporaire, Corps diplomatique, Mission diplomatique.

Il a été, en outre, constaté que 275 véhicules neufs sur les 10 536 sont immatriculés avec des châssis en IM5 (AT ou Vignettes) sans aucune déclaration de mise à la consommation IM4 portant sur le châssis. Ces immatriculations ne sont pas des (IT/CD/MD). Notons que IM4 équivaut aux marchandises mises à la consommation avec tous les droits et taxes payés.

Quid des véhicules usagés ? Relativement aux véhicules usagés, il a été constaté que 163 voitures sur 91 032 sont encore en AT ou vignettes touristiques avec des Civio (qui est le numéro de suivi de la voiture). Les châssis et les Civios ne font référence à aucune déclaration de mise à la consommation (IM4).

Ce travail a aussi permis de se rendre compte que 589 véhicules usagés immatriculés avec des Civio sur le même échantillonnage ne sont couverts par aucune déclaration de mise à la consommation (IM4). Et que les Civios sont non apurés.

L’on s’est, en sus, rendu compte que sur les 91 032, 4 253 véhicules usagés immatriculés ne sont couverts par aucune déclaration et par aucune Civio. Ces véhicules ne sont pas des véhicules neufs, parce qu’ils ne recouvrent pas les châssis dits neufs.

De plus, le constat a été fait que sur 91 032, 4 575 véhicules usagés restent toujours avec des valeurs Fob (littéralement, ça veut dire sans frais à bord) déclarées inférieures aux valeurs Fob attestées par le document Civio.

Pour parvenir à ses résultats, les enquêteurs se sont appuyés, entre autres, sur la base des véhicules neufs et usagés de la Sicta, celle des Civios, des déclarations, des véhicules neufs Sicta. Ils ont usé aussi de la base des châssis déclarés dans le Sydam pour toutes les déclarations (IM4-IM5-IM7). Face à ces énormes fraudes présumées, le Dg des douanes, Da Pierre ne pouvait rester inactif. D’où sa saisine de la Justice pour tirer toute cette affaire au clair.

 

 

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