Bonjour Stéphie,
J’ai 25 ans, je suis en master dans une école au Maghreb. Je vis en couple avec mon homme depuis quatre ans bientôt. Tout va bien entre nous, on se dispute souvent mais on s’aime trop pour se détester donc ça s’arrange toujours. Après des vacances au pays, l’école a demandé que je fasse des examens sérologiques et bactériologiques. Le résultat de l’examen sérologique est tombé hier: Je suis séropositive.
Tu n’imagines pas comment le ciel m’est tombé sur la tête. Je me suis retenue de crier mais j’ai pleuré dans le bureau du médecin de la santé publique. La totale, c’est qu’on a envoyé une infirmière me chercher à l’administration de l’école. Vous imaginez si la nouvelle circule à l’école… J’ai pris mon sang froid et je suis retournée à l’école. J’ai dit à l’administration qu’on m’avait seulement demandé de refaire les examens bactériologiques et aussi qu’on avait détecté des résidus de paludisme mal traité. Ils ont été rassurés et le médecin m’a promis que le secret professionnel sera gardé. Il m’a donné un bon de prise en charge pour le traitement de ma séropositivité. Aujourd’hui je vois la vie différemment, je souffre intérieurement car étant de nature joviale et souriante, je dois continuer à le rester vis à vis de mon entourage et de mon école. Mon mari n’est pas encore au courant, j’attends qu’il revienne de son voyage dans un mois. En attendant, je suis seule à porter ce lourd fardeau. Je n’ai personne à qui me confier. J’ai peur d’être jugée et rejetée. Mes parents ne pourraient pas supporter cette nouvelle, je suis la seule fille de ma mère. Comment pourrais-je tenir un mois sans en discuter avec mon homme? Comment vivre normalement quand je sais que le virus du VIH sommeille tranquillement dans mon organisme? Comment lui annoncer cette nouvelle si grave? Je veux avoir tes conseils et être en contact avec des personnes qui vivent ou qui ont vécu la même situation que moi. Une compatriote seule et désespérée à l’étranger.
Chère lectrice, Essaie, s’il te plaît, de faire le vide dans ta tête car plus tu stresses et moins c’est bon pour ta santé qui doit être ta priorité. Un mois, c’est long, mais c’est court aussi. Je peux comprendre ton impatience, ton mal être, mais prends soin de toi d’abord. Tu as une prise en charge, alors commence par rencontrer le spécialiste qui te suivra et tu verras qu’au fil des jours tu trouveras les armes qu’il faut pour aborder le sujet avec ton partenaire. Quand il reviendra de son voyage, laisse- lui quelques jours de répit avant d’aborder le sujet. Même si tu brûles d’impatience, vas pas à pas. Profites d’une petite causerie et commence par poser des questions portant sur le VIH/SIDA à ton homme pour cerner un peu sa position sur le sujet. Si le courage te manque vraiment, laisse trainer dans votre chambre l’enveloppe des analyses pour qu’il la voie. Il te demandera certainement «Qu’est-ce que c’est ?», «Tu as fait des analyses ?»…une occasion pour te lancer sur le sujet. Certes cela sera difficile car annoncer ce genre de nouvelle l’est toujours, mais tu te faciliteras la tâche de la sorte car l’important c’est de trouver le moment adéquat pour parler. Il est clair que ce que tu diras ensuite ne sera pas accueilli avec le sourire. Toi-même, tu as vécu ça et tu sais combien c’est dur. Mais l’autre nom de Dieu c’est le temps. Et on finit par relativiser à la longue les choses les plus terribles. Je dis toujours qu’une épreuve est faite pour être vécue à un moment. La vie te fait un faux coup, fais en de même en prenant ta revanche. Une porte semble se fermer pour toi avec toutes les difficultés que cela comporte, mais il y a toujours une issue et quand tu réussis à ouvrir d’autres horizons, la vie prend son sens et sa beauté. Ne baisse pas les bras ma puce, accroche-toi s’il te plaît. Tu n’es pas une pestiférée et le VIH/SIDA n’est plus une calamité de nos jours. Il faudra t’adapter à une nouvelle vie, une nouvelle orientation, de nouveaux objectifs, mais ça, on le vit tous d’une manière ou d’une autre dans nos diverses existences. Toi tu es séropositive, d’autres sont amputés des jambes ou des bras, deviennent aveugle, perdent à la fois leur travail, leur partenaire, n’ont aucun soutien, amical, familial ou autre mais ils s’accrochent parce que tant qu’il y a la vie, il y a de l’espoir. Bisous et donne-moi de tes nouvelles de temps en temps, okay ?
Par Stéphie Joyce