04192024Headline:

Quel espoir nous reste-t-il ?

Quel espoir nous reste-t-il ?

Les gilets jaunes sont venus nous le dire : Le mondialisme n’est pas un humanisme.

De fait, le social est resté national, son organisation et sa mise en œuvre n’ont pas réussi à sortir du cadre géométrique de la nation ; la Chine ne cotise pas à nos caisses de chômage bien qu’elle ait pris beaucoup de nos emplois. D’ailleurs personne d’autre que nos compatriotes ne payent les dommages causés à notre organisation publique par la pratique mondialisée du dumping social et démocratique. Dans le jeu trouble de la mondialisation économique, les racines férocement nationalistes de sa culture ont assuré au peuple Allemand, un armement moral autrement plus efficace que le mondialisme gnangnan de notre culture d’extraction catholique et marxiste. Je ne cherche à dénigrer ni le catholicisme qui reste, à mes yeux, la religion la plus aboutie intellectuellement, ni le marxisme qui constitue toujours la principale analyse critique du capitalisme, mais aborder la mondialisation en pariant sur la loyauté d’une concurrence ivre et totalement forcée, c’est refuser de voir que ceux que nous embrassons sur la bouche en profitent pour nous faire les poches. En sacrifiant cyniquement la maigre aisance de ses travailleurs les plus modestes, l’Allemagne a développé une stratégie d’exploitation commerciale agressive envers ses propres partenaires européens qui s’est traduite par des excédents commerciaux éhontés dans l’esprit d’une union. On peut aussi noter les stratégies fiscales non moins impavides du Luxembourg, de l’Irlande et des pays bas…

Mais au-delà du scandale de la répartition inéquitable des richesses qu’aucune tentative de redistribution ne parvient plus à corriger, nous affrontons maintenant un problème catastrophique d’affaiblissement de notre économie. Le libre échange a presque achevé de détruire notre industrie, il sape désormais notre agriculture.

Face à cette situation les politiques « pro-business » n’ont d’autre ambition que d’attirer des investisseurs. Mais l’investissement n’est pas une panacée universellement homogène, il y a un monde entre celui qui investit dans son entreprise, se démène corps et âme pour réussir, embauche, paye ses impôts d’une part et, d’autre part, les grands corsaires de la finance internationale qui investissent essentiellement dans :

– La captation des marchés,

– Celle des brevets et outils,

– Les délocalisations,

– La robotisation,

– La vente aux chômeurs de produits importés,

– La spéculation,

– L’optimisation fiscale,

– Le lobbying et la confiscation des choix démocratiques…

Ceux ci n’ont aucun projet d’intérêt général si ce n’est la monopolisation du général au profit du particulier. De facto ce type d’investissement disloque notre économie et détruit plus d’emplois qu’il n’en crée.

Persister indistinctement dans les politiques pro-business telles qu’elles ont été conçues, relève de l’aveuglement.

Au delà de l’investissement, ce dont nous avons besoin est une réindustrialisation sérieuse. Or l’industrie n’est pas la conséquence automatique de l’investissement, elle est l’œuvre des ingénieurs.

Et bien parlons des ingénieurs :

La France a la chance de posséder de bons ingénieurs. Ce n’est pas vanité de l’affirmer quand notre pays s’est montré capable de rivaliser, dans la plupart des secteurs technologiques, contre les USA qui y ont cependant consacré des budgets immensément supérieurs. J’ai toujours été surpris, lorsque je dirigeais une équipe d’ingénieurs Américains, de les entendre systématiquement répondre : « yes sir » à chacune de mes injonctions quand l’ingénieur Français m’aurait immanquablement répondu : « pourquoi ? » C’est toute la différence entre une formation par l’apprentissage et une formation à l’esprit critique. A ces différences de raisonnement s’ajoute un avantage en termes de gestion du risque : l’ingénieur Américain ne démarre jamais un projet avant que sa planification minutieuse ne soit achevée et que l’ensemble des moyens requis ne soit disponible. L’ingénieur latin s’accommode facilement d’une part raisonnable d’incertitude et d’improvisation. C’est un ensemble de caractéristiques culturelles et comportementales qui a permis à la France de développer, par exemple, des avions réussis bien qu’elle n’ait jamais pu amortir ses frais sur plus que quelques centaines d’appareils quand l’équivalent US en nécessite couramment plusieurs milliers. L’activité économique n’est que le reflet d’une culture et d’une civilisation.

La situation de la France n’est pas tout à fait désespérée, il lui reste quelques avantages et une chance suffisante de réussir sa réindustrialisation pour peu qu’elle se batte avec ses propres armes, pas avec celles de ses adversaires.

Or, précisément, la qualité des ingénieurs Français est en train de se dissoudre dans le management à l’anglo-saxonne tel qu’inlassablement véhiculé par les écoles de commerce et d’administration, les cabinets de conseil en organisation, les logiciels de gestion et la normalisation des procédures. Pour mémoire, le grand boom de la normalisation des procédures remonte à la seconde guerre mondiale, lorsqu’il devint inévitable de confier des tâches complexes de maintenance de systèmes d’armes évolués à des personnels considérés comme incompétents en ces temps d’apartheid aux USA. Inversement, lorsqu’on impose à un opérateur qualifié une procédure destinée à pallier son incompétence supposée, il y a fort à parier qu’elle finisse par le rendre incompétent. Néanmoins l’abus de normalisation procédurale a déferlé dans nos entreprises afin de rendre le travail indépendant des compétences, volatile et délocalisable à souhait.

Comme la respiration, indispensable à la vie dont elle n’est pas le but, le profit est indispensable à l’équilibre des entreprises industrielles dont il ne devrait pas constituer le but qui est d’utilité publique. Mais le profit a bel et bien été perverti en but ultime ce qui a impliqué de pervertir le management en fonction suprême.

Le manager a donc pris le pouvoir sur l’ingénieur qu’il gère « en boite noire » ne comprenant pas bien son métier et le suspectant de « faire de la technique » comme d’autres se « payent des danseuses ». Dans ce contexte l’ingénieur dérive facilement de l’aridité technique vers la commodité du « reporting », de « l’action list follow up », du « power point » et du « budget management », immensément plus simples et mieux rémunérés que la conception technique. C’est un gâchis. On ne le dira jamais assez, le management n’a pas d’existence intrinsèque, il n’est que la mise en œuvre d’un tropisme conceptuel appliqué à l’activité humaine. Lorsque ce tropisme s’écarte des contraintes morales et de l’intérêt général, le management n’est plus qu’une imposture. Depuis que l’on se pique de gérer nos entreprises, elles crèvent l’une après l’autre. Il y a un biais.

Dans cette situation comment réindustrialiser sans passer sous les fourches caudines des corsaires de la finance ?

N’ayons pas la vanité de nier la puissance du capitalisme dans la dynamique de l’économie, contentons nous d’essayer de le contenir dans son domaine d’efficacité, à savoir la diffusion de l’activité économique au sein du tissus social. Clairement, les banques et les hyper-groupes qui s’épanouissent dans l’univers de la grande prédation transnationale devraient être urgemment re-vassalisés par les états, à coups de droits conditionnels d’accès aux marchés nationaux, mais là n’est pas notre propos. Nous ne nous intéressons ici qu’aux entreprises à taille humaine, celles qui créent des emplois, payent des impôts et développent des projets techniques au lieu de se constituer en bureau administratif de gestion des sous-traitants et de racheter leurs propres actions pour créer de la valeur virtuelle.

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