Les pays de l’Otan, réunis en sommet à Madrid, vont « inviter » officiellement mercredi 29 juin la Suède et la Finlande à rejoindre l’Alliance atlantique, après la levée ce mardi 28 juin du veto turc à leur adhésion. Ankara était opposé à leur entrée, les accusant de soutenir les combattants kurdes du PKK et leurs alliés, considérés comme terroristes.
« Je suis ravi d’annoncer que nous avons un accord qui ouvre la voie à l’entrée de la Finlande et de la Suède dans l’Otan », a déclaré ce mardi le secrétaire général de l’Alliance atlantique, Jens Stoltenberg.
Les trois pays ont « signé un mémorandum qui répond aux préoccupations de la Turquie notamment à propos des exportations d’armes et de la lutte contre le terrorisme », a ajouté le numéro un de l’Otan. Cela au terme de plus de trois heures de discussions mardi à Madrid, en marge du sommet de l’Alliance atlantique
« La Turquie a obtenu ce qu’elle voulait », a déclaré la présidence turque dans un communiqué. Les deux pays candidats se sont engagés à « la pleine coopération avec la Turquie dans la lutte » contre le Parti des travailleurs du Kurdistan, le PKK, considéré par Ankara et ses alliés occidentaux comme une organisation terroriste, ainsi que contre les mouvements qui lui sont affiliés, est-il précisé dans ce texte.
Helsinki et Stockholm s’engagent également à « faire preuve de solidarité avec la Turquie dans la lutte contre le terrorisme sous toutes ses formes ». De même, les deux capitales se sont accordées pour ne « pas imposer de restrictions ou d’embargo sur les industries de défense », a poursuivi la présidence. Il s’agissait des principales revendications de la Turquie pour lever son objection à l’élargissement de l’Otan à la Suède et à la Finlande.
La présidence turque affirme encore que les deux nouveaux entrants prendront « des mesures concrètes pour l’extradition des criminels terroristes » de leur territoire, et pour « interdire les activités de collecte de fonds et de recrutement du PKK et de ses affiliés » chez eux.
Enfin, elle se félicite du fait que le mouvement « Fetö » du prédicateur Fetullah Gülen, installé aux États-Unis et que Recep Tayyip Erdogan tient pour responsable de la tentative de coup d’État de 2016, soit reconnu comme « une organisation terroriste » au même titre que le PKK, les YPG et les autres. Elle y voit « une étape très importante dans la dimension internationale de la lutte de la Turquie » contre le terrorisme.
L’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’Otan va rendre l’Alliance « plus forte et plus sûre », a réagi mardi soir le Premier ministre britannique Boris Johnson. C’est « une nouvelle fantastique alors que nous commençons notre sommet de l’Otan, a-t-il dit sur Twitter. L’adhésion de la Suède et de la Finlande vont rendre notre brillante alliance plus forte et plus sûre », a-t-il poursuivi.
Washington s’en réjouit également, et précise qu’Ankara n’a pas fait « de demande particulière de concessions aux Américains ». Recep Tayyip Erdogan doit rencontrer mercredi Joe Biden en marge du sommet de Madrid. Leur dernière rencontre remonte au mois d’octobre dernier à Rome, en marge du G-20.
Avant de se rendre en Espagne, le président turc a expliqué que le « sujet le plus important » à ses yeux était « celui des F-16 ». Ces avions de combat, commandés et partiellement payés par la Turquie, avait vu leur livraison suspendue par les États-Unis, après l’acquisition, par la Turquie, d’un système de défense russe : S-400.
« La Turquie a obtenu ce qu’elle voulait. » Tous les médias proches du pouvoir turc reprennent en chœur cette formule pour annoncer la fin du veto à l’adhésion de la Suède et la Finlande à l’Otan.
Sur le papier, Recep Tayyip Erdogan semble en effet avoir obtenu tout ce qu’il réclamait : engagement de Stockholm et Helsinki à empêcher les activités du PKK sur leur territoire et à ne pas soutenir l’émanation syrienne de ce groupe armé kurde, les YPG ; promesse de traiter « rapidement » les demandes d’extradition émises par la Turquie ; ou encore levée de l’embargo sur les ventes d’armes à ce pays.
Recep Tayyip Erdoğan peut présenter ce document comme une victoire pour la Turquie, et comme une victoire personnelle face à son opinion publique, lui qui avait tant médiatisé son opposition initiale à l’intégration dans l’Otan de la Suède et de la Finlande.
Reste à voir si ce revirement sera pérenne. Les trois pays annoncent aussi la création d’un « mécanisme permanent » pour suivre la mise en œuvre de ces engagements. La Turquie avait fait savoir qu’elle pourrait toujours bloquer l’adhésion des deux pays nordiques si elle estimait que ses demandes n’étaient finalement pas satisfaites.