Barthelemy Zouzoua Inabo encore cité par Fernand dans une épitre. L’épitre à Zouzoua du jour s’intitule, “Les problèmes fonciers dans le pays de ton camarade… ” une occasion de pointer du doigt la corruption en société.
Les problèmes fonciers dans le pays de ton camarade… Un dossier brûlant agite la paisible ville de Jacqueville. Adoukro, le paradis rêvé. Terre de discorde. La Justice a tranché. Les propriétaires terriens sont braqués. Tout le monde sait. Mais tout est bloqué. L’Administration ivoirienne à l’épreuve de ses propres turpitudes…
M. Édouard Odah, Directeur général de la Société générale d’investissement et de réalisation, (SGIR SA) a pour lui, plusieurs décisions de Justice rendues par les juridictions ivoiriennes. Elles lui donnent droit de propriété sur le village d’Adoukro, dans la sous-préfecture de Jacqueville. Il a un projet majeur sur cet espace, notamment une opération immobilière dénommée « Adoukro, ville nouvelle ».
Terre inaccessible
Seulement voilà, il ne peut accéder aux lieux en raison d’une forte opposition des populations villageoises qui se sentent lésées par les différentes décisions de justice et qui se disent de fait, expropriées de leur patrimoine. Le chef de file des contestataires n’est autre le Maire de Jacqueville, Joachim Beugré.
Le 3 septembre 2021, en exécution des réquisitions du Procureur général, environ deux cents gendarmes se sont présentés à Adoukro pour déguerpir les occupants et permettre l’exécution du projet « Adoukro, ville nouvelle ». M. Édouard Odah explique. « Vers 11 h, le maire de Jacqueville est arrivé sur les lieux pour demander l’arrêt de l’exécution des travaux. Le capitaine de la gendarmerie sur place nous a informés qu’il a arrêté l’opération suite à un coup de fil reçu du haut lieu. Nous avons lu dans la presse plus tard, que c’est le premier ministre qui a demandé la suspension de l’exécution de la réquisition du Procureur au général ».
Le Maire Joachim Beugré, rencontré dans son bureau de Président de Conseil d’administration de la Petroci confirme avoir saisi le premier ministre, en raison des risques de troubles graves qui pointaient. Une source à la Primature confirme que le chef du gouvernement a été effectivement saisi du dossier. « Il a demandé un rapport au ministre de la Justice et des Droits de l’Homme. Puis il va réunir toutes les parties pour ramener le calme »
Pomme de discorde
Chaque partie est sûre de son fait et l’exprime avec passion. L’opérateur économique se déclare successeur du chef de terre et agit donc en toute légalité. « Mon père est Dida de Divo. Ma mère est Ahizi et Avikam de Tiagba. Ma grand-mère est de Tiagba faisant partie des 3A. En raison de la succession matriarcale, je suis dans mes intérêts. », soutient Édouard Odah. Il fait noter qu’il a été élevé par l’oncle de sa mère, qui l’a adopté comme son premier fils. C’est cet oncle-là qui fut le premier chef de N’djem en 1971. « J’ai tout hérité de lui après son décès en 1993. ». Adoukro a été érigé en village en 2007. « Il fallait à partir de là, régulariser la situation administrative de ce qui était auparavant, un campement. ».
La version est toute autre, du côté des contestataires. Joachim Beugré: « Adoukro comporte une partie sociologique et une partie technique. Les peuples en bordure de lagune sont hospitaliers. Édouard Odah est notre beau. Son épouse est de Jacqueville. Chaque village de Jacqueville a son débarcadère. Édouard Odah découvre après le décès de son beau-père, un beau site avec du sable blanc et des cocotiers. Il contacte l’ancien-maire de Jacqueville pour le lotissement de l’espace. Son beau-père n’avait en fait que 50 ha à Adoukro. Mon village, Sassako qui a son campement à Adoukro voit alors le lieu érigé en village. Premier choc. Second choc, nous apprenons que le campement, devenu village, nomme un chef de village. Nous apprenons aussi que celui qui est désigné chef du village est en fait celui à qui nos parents avaient donné la terre. ». Inacceptable pour les villageois selon Joachim Beugré. Ils décident d’empêcher l’installation du chef nommé. « Ils se font justice. ». Une plainte est déposée et les parents sont condamnés en 2007. « L’affaire prend une telle proportion que le Président Laurent Gbagbo demande au ministre de la Justice d’intervenir pour la libération des vieux. »
Au niveau technique, 75 oppositions sont notées pour l’avis de commodo et incommodo. Ce qui oblige l’ancien maire, selon Beugré Joachim, à suspendre les travaux de lotissement. Autre problème technique, toujours selon le maire de Jacqueville, « la superficie totale de Adoukro est de 709 ha. Les approbations demandées couvrent 2400 ha. ».
Justice et réalité du terrain
Édouard Odah a éprouvé toutes les démarches administratives, juridiques et judiciaires. Il a gagné tous les procès. Il attend l’exécution des décisions de Justice pour la mise en œuvre de son projet. Il a échappé à la mort en avril 2015 sur les lieux. Il a eu la vie sauve grâce aux commandos-marins qui l’ont ex-filtré. Les contestataires reconnaissent un fait: « dans notre région, nous sommes lents à agir. Nous n’avions pas pris les dispositions idoines au départ pour la partie juridique. Édouard Odah a gagné les procès parce que nous nous y sommes pris tard. ».
Les villageois sont vent debout. Ils assurent que le projet ne peut pas être exécuté en l’état. Ils se disent ouverts au dialogue mais il faut d’abord rétablir les villageois dans leurs droits, la terre leur appartient disent-ils. Ensuite, ramener Adoukro dans sa superficie de base (709 ha) et attribuer à chacun la parcelle qui lui revient.
L’opérateur économique ne comprend pas cette demande. Pour lui, l’espace concerné relève d’une zone d’aménagement différé (ZAD). « C’est un domaine classé d’utilité publique. Dans la ZAD, pas de propriétaires terriens, donc pas de propriétaires fonciers. ».
D’un côté comme de l’autre, colère et détermination. La Justice a tranché. Mais le terrain est brûlant. Ton Camarade est bien informé de la situation. Et chez celle qu’il appelle « Tantie Henriette »…