La crise qui secoue la « Maison verte » depuis quelques temps déjà connaît un nouveau rebondissement. A l’issue d’une confrontation à la Caisse nationale de prévoyance sociale (CNPS), les syndicats ont découvert que la direction leur a caché l’étendue des préjudices subis par les travailleurs.
De fortes sommes détournées de leur destination initiale
Venance Konan, directeur général de Fraternité Matin
Les sommes prélevées par la direction de Fraternité Matin aux travailleurs et non reversées à la CNPS s’élèvent en réalité à 600 millions de francs CFA, contrairement aux 200 millions reconnus par ladite direction. Ce trou gigantesque a été découvert lors de la confrontation entre les dirigeants sociaux du journal pro-gouvernemental et celle de la CNPS d’Adjamé.
C’est lors de la réunion de conciliation à l’inspection du travail et des lois sociales d’Abobo-Adjamé qui s’est tenue, le 26 avril 2021, que la direction de Fraternité Matin a reconnu la somme de 200 millions de francs CFA. La réunion de conciliation avait abouti à la suspension de la grève de 72 heures projetée par l’ensemble des cinq syndicats de l’entreprise, Cependant, les syndicats avaient eu un doute persistant sur la véracité des déclarations de la direction de l’entreprise.
Une dette reconstituée en moins de 3 ans !
La “Maison verte” à nouveau dans la tourmente
Les travailleurs ayant jugé le montant de la dette largement sous-évaluée, ils ont par conséquent saisi la CNPS d’Adjamé dont dépend leur entreprise en vue d’une confrontation entre leur direction et celle de la caisse sociale. C’est après cette confrontation que les travailleurs ont pris la pleine mesure de l’étendue des dégâts. 600 millions, c’est la bagatelle détournée de sa destination initiale.
En 2018, dans le cadre de l’exécution du plan de relance de l’entreprise qui battait déjà de l’ail, le gouvernement, entre autres mesures, avait épongé une dette colossale de 1,5 milliards de francs représentant le cumul des prélèvements non-reversés à la Cnps, sur la période de 2011 au 31 décembre 2019.
Les précomptes sur salaires et non réservés qui avaient été épongés en totalité se sont donc reconstitués et s’établissent aujourd’hui à 600 millions. C’est ce que relève la confrontation à la CNPS. Cette dette couvre la période du 31 décembre 2019 à ce jour !
Qui pour sauver “le soldat” Fraternité Matin ?
Le Président Ouattara devra encore intervenir
Avant la mise au net à la CNPS, les travailleurs se plaignaient déjà du non-reversement de sommes précomptées sur salaire, au titre des cotisations pour leur mutuelle et pour le remboursement des prêts scolaires consentis par la Banque nationale d’investissement (BNI). A ce jour, la direction de l’entreprise doit à la banque la somme de 10 millions. Les prêts scolaires sont donc compromis à Fraternité Matin. Autre conséquence, les caisses de la mutuelle des travailleurs de l’entreprise sont aujourd’hui totalement à sec. Ses prestations diverses ont donc marqué un arrêt brutal. Quant au paiement des allocations familiales, il est lui-aussi suspendu depuis 2017.
Comme on le voit, de larges nuages noirs annonciateurs d’un gros orage s’amoncellent dans le ciel de l’entreprise à capitaux publics. A moins que l’État vienne sauver la situation en renflouant, une fois de plus, ce véritable tonneau des Danaïdes!
Théodore Sinzé