04202024Headline:

Révélations-magouilles de la Cpi contre Gbagbo: Craignant une poursuite judiciaire, Ocampo accuse Bensouda

Luis Moreno-Ocampo a certainement oublié qu’il ne fait plus partie des effectifs de la Cour pénale internationale (Cpi). L’ancien procureur de la Cour qui a fait valoir ses droits à la retraite depuis 2012, continue à croire qu’il peut encore et toujours donner des ordres et directives à sa remplaçante, Mme Fatou Bensouda, l’actuelle procureure. Plus que sonné par les révélations de Médiapart, sur ses accointances avec le régime Ouattara pour écarter du Pouvoir le président Laurent Gbagbo, l’ancien procureur Argentin a récemment envoyé un email à Bensouda. Lui demandant de ne pas tenir compte desdites révélations de Médiapart, parce que selon Ocampo, les documents ayant servi de base aux enquêtes proviendraient des sources illégales.

« Comment les gens ont pu obtenir ses/ces documents supposés secrets » afin d’établir ici des actes criminels. » Ecrit Luis Moreno-Ocampo. Et le juge Argentin de proférer des menaces à peine voilées à l’encontre de Fatou Bensouda qui a travaillé sous ses ordres dans un passé récent : « Selon les propres termes de L’OIM, il ne peut pas prendre en compte des informations obtenues par des moyens criminels ». Que craint Luis Moreno-Ocampo pour qu’il fasse un rappel de procédure interne à Fatou Bensouda ?

Après plusieurs mois d’enquêtes, Médiapart sortait le dossier de l’année intitulé : ‘’Procès Gbagbo: les preuves d’un montage’’. Et le confrère en ligne de révéler : « Un document confidentiel de la diplomatie française révèle que la Cour pénale internationale a demandé en avril 2011 de garder prisonnier le président de la Côte d’Ivoire, Laurent Gbagbo. Seulement à cette époque, il n’existait ni mandat d’arrêt ni enquête de la CPI. Révélations sur une opération aux airs de Françafrique. »

On pouvait lire dans le dossier d’enquêtes qui cite nommément l’ancien procureur de la Cpi : « La CPI et Luis Moreno Ocampo son premier procureur, ont monté un dossier en dehors de toute procédure légale, hors de toute compétence, et hors de toute saisine, pour incarcérer et maintenir l’ex Président Laurent Gbagbo en détention ».

Un des journalistes qui a pris part aux investigations fait le commentaire suivant : « à la lumière des faits documentés, la CPI est trop peu impartiale et indépendante, elle est surtout utilisée par certaines puissances internationales dominantes, comme un outil de régulation géopolitique (pour) contrôler politiquement certaines parties du monde. Et çà, pour qui a à cœur les idées de démocratie et de justice internationale, d’impartialité, il ne s’agit pas de choisir son camp, c’est proprement insupportable’’. S’indigne le journaliste de Médiapart.

Suite à ces révélations, la Cpi avait botté en touche dans une déclaration rendue publique dans la foulée des publications de Médiapart.

« Depuis vendredi dernier émanent d’articles parus dans certains médias des allégations visant l’ancien Procureur de la Cour pénale internationale (la « CPI » ou la « Cour »), M. Luis Moreno Ocampo. Ces articles se fonderaient sur 40 000 documents, y compris des courriels privés, obtenus et analysés par l’European Investigative Collaborations et onze médias participant à cette enquête. Bien qu’on ait pu laisser entendre publiquement que des systèmes de messageries électroniques privées ont été piratés, la Cour ignore comment ces documents ont été obtenus. » S’offusque la Cpi avant d’annoncer qu’elle ouvre une ‘’enquête’’. Mais le confère Médiapart ne lâche pas l’affaire pour autant.

Fatou Bensouda : « L’inquiétude me gagne »

A la suite de la réaction de la Cpi, Mediapart revient à la charge et révèle l’inquiétude qui aurait gagné la procureure Fatou Bensouda : « La Cour pénale internationale a annoncé l’ouverture d’une enquête interne, affirmant prendre ‘’très au sérieux’’ les informations mises au jour par Mediapart et l’EIC sur une série de dysfonctionnements majeurs. ‘’L’inquiétude me gagne’’, confie la procureure en poste, Fatou Bensouda. »

C’est cette inquiétude de la magistrate d’origine gambienne qui contamine son prédécesseur Argentin Luis Moreno-Ocampo. Sinon comment comprendre qu’au moment où la Cour promet d’ouvrir ses propres enquêtes sur le comportement de son ancien procureur, ce dernier se précipite-t-il pour intimider Fatou Bensouda ? Assurément, se sachant trempé jusqu’au os, M. Moreno-Ocampo a peur que les enquêtes diligentées par l’OIM (structure d’enquête interne de la Cpi) ne révèlent ses intrigues et que ne soit lancée contre lui une procédure judiciaire.

Ocampo redoute ce qui est arrivé à la Fifa

Ocampo sait de quoi il parle. Dès son départ à la retraite de la Cpi le juge argentin avait postulé à diriger la Commission d’Éthique indépendante (CEI). La Commission d’Éthique indépendante est un des organes juridictionnels de la FIFA. Elle est en premier lieu chargée de se pencher sur de possibles violations du Code d’éthique de la FIFA. Depuis 2012, elle est divisée en deux chambres : la chambre d’instruction et la chambre de jugement. Elle est à l’image du Tribunal arbitral du sport (TAS). La puissante institution internationale qui propose un arbitrage ou une médiation dans le monde du sport. Domiciliée à Lausanne en Suisse, elle dépend du Conseil international de l’Arbitrage en Matière de Sport (CIAS).

La Commission d’Éthique indépendante (CEI) est redoutable quand elle sévit. L’on se rappelle encore du scandale qui avait coulé Joseph Blatter l’ancien tout puissant président de la Fifa. Sans compter Jérôme Valcke, secrétaire général de la Fifa relevé de ses fonctions qui a vu sa suspension provisoire de toute activité liée au football prolongée de 45 jours. Neuf ans de suspension ont été requis par la justice interne de la Fifa contre Valcke. Contre cet ancien bras droit Sepp Blatter, le juge instructeur de la Fifa a réclamé une amende de 100 000 francs suisses (92 165 euros). Mais il y a aussi dans la même affaire de corruption, Jeffrey Webb, ancien président de la Confédération d’Amérique du Nord, d’Amérique centrale et des Caraïbes (Concacaf), révoqué de son poste. Avec eux 14 autres hautes personnalités de la Fifa inculpées par la justice américaine pour corruption.

Pourquoi les menaces d’Ocampo contre Bensouda ne vont pas prosoérer

Ocampo se souvient donc de la manière dont le scandale de la Fifa (Fédération international de football association) a été géré par des juges intègres et surtout par la justice américaine. Il pouvait se permettre toutes sortes d’abus ce d’autant plus qu’il bénéficiait du parapluie atomique de l’ancienne puissante Secrétaire d’Etat américain, Mme Hilary Clinton qui n’est pas étrangère au dossier ivoirien qui a conduit le président Laurent Gbagbo à la Cpi. La candidate malheureuse à la présidente américaine sous l’administration du président Barack Obama avait persuadé ce dernier à mettre la pression sur l’ancien chef d’Etat ivoirien pour le bouter hors du Pouvoir. Mais avec l’avènement d’un nouveau patron à la Maison Blanche en la personne du président Donald Trump, Luis Moreno Ocampo sait qu’il a très peu de chance d’échapper à la justice. D’ailleurs le président Trump ne cache pas son acrimonie contre l’Onu dont il menace de couper les vivres. Un des plus gros pourvoyeurs de fonds de la Cpi à travers ses entreprises, les Etats Unis de Donald Trump pourraient trouver du grain à moudre dans le scandale révélé par Mediapart qui mouille Luis Moreno-Ocampo. Si donc le juge argentin a peur de la justice qu’en est-il de sa consœur et ancienne collaboratrice la Gambienne Fatou Bensouda ? Autant dire que tous les deux sont logés à la même enseigne. Autant qu’Ocampo, Bensouda qui a déjà annoncé « l’inquiétude qui la gagne » ne peut pas prendre le risque de vouloir interférer dans les enquêtes conduites par OIM.

C’est pourquoi en rappelant à Fatou Bensouda, comme si cette dernière aurait subitement oublié comment fonctionne l’institution qui l’emploie, Luis Moreno-Ocampo file du mauvais coton qui pourrait aggraver sa situation. « Selon les propres termes de L’OIM, il ne peut pas prendre en compte des informations obtenues par des moyens criminels », se souvient en effet Luis Moreno-Ocampo qui aimerait que sa remplaçante influence l’enquête en cours contre lui et brouille les pistes sur la manière dont les documents ont été obtenus par Médiapart et l’EIC (European Investigative Collaborations) et les onze médias qui ont participé activement à cette enquête. »On ira jusqu’au bout », avait indiqué, serein, le président Laurent Gbagbo qui croupit à la Cpi depuis le 30 novembre 2011. Certainement que ce »bout » n’est pas plus loin pour l’ancien chef d’Etat ivoirien élu démocratiquement et chassé par les armes.

Par Simplice ALARD-GUIGREI

 

 

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