Célébrée cinquante jours après Pâques, la Pentecôte commémore l’effusion du Saint-Esprit sur un groupe de disciples de Jésus. La théologienne Odile Flichy revient sur cet épisode qui marque le point de départ de l’évangélisation.
En grec, le terme pentêkostê signifie « cinquantième ». Selon la tradition chrétienne, c’est en effet cinquante jours après la Résurrection de Jésus que ses disciples, réunis pour la fête juive de Chavouot, reçoivent « la force du Saint-Esprit ».
Cet épisode fondateur, qui marque le début de l’Eglise, est relaté dans les Actes des apôtres. Ce livre du Nouveau Testament met en scène l’universalisation du message de Jésus, depuis les premières persécutions de Jérusalem jusqu’à l’évangélisation de Rome, comme l’explique ici la théologienne Odile Flichy.
Que sait-on du contexte d’écriture des Actes des apôtres ?
Odile Flichy. L’hypothèse qui tend actuellement à s’imposer est celle d’un seul auteur, Luc, d’un ouvrage en deux volumes : son Evangile et les Actes des apôtres, composés à la fin du Ier siècle. La possibilité de deux auteurs différents ou celle d’un ouvrage unique divisé en deux ne sont plus défendues aujourd’hui.
Luc peut donc être considéré comme le premier historien du christianisme, ce qu’il revendique d’ailleurs lui-même au début de son Evangile. Il fait d’abord l’histoire de l’œuvre de Jésus puis, avec les Actes, raconte comment les apôtres ont poursuivi sa mission ; les événements débutent peu après la mort du Christ, vers 33 ou 34, et s’achèvent après l’arrivée de Paul à Rome vers 64. Luc aurait donc écrit une vingtaine d’années après les faits.
Le livre débute sur un moment fondateur pour la communauté : la venue de l’Esprit saint à la Pentecôte. Que signifient les « langues de feu » qui se posent sur chacun des apôtres ?
L’événement est annoncé dès l’ascension de Jésus, que Luc raconte deux fois, à la fin de son Evangile et au début des Actes, dans une sorte de tuilage narratif. Jésus leur dit alors : « Vous serez mes témoins. » Le terme est capital, car pour Luc, c’est avoir été témoin de la résurrection qui définit un apôtre – à ses yeux, Paul n’en est donc pas un. Mais, on l’oublie souvent, ces douze apôtres symbolisent les peuples d’Israël et cet événement de la Pentecôte, qui se déroule à Jérusalem, ne s’adresse qu’aux juifs. Selon la théologie de Luc et de Paul, l’annonce de la Bonne Nouvelle se fera d’abord auprès d’Israël avant d’être révélée au reste du monde.
« Les langues de feu signifient que, désormais, les apôtres pourront s’adresser à tous les peuples d’une façon qu’ils comprendront »
Luc relate les faits avec le lexique habituel de la théophanie : l’Esprit saint se manifeste par du bruit, du vent et des langues de feu. Ces dernières signifient que, désormais…
LA les apôtres pourront s’adresser à tous les peuples d’une façon qu’ils comprendront. L’universalité est ainsi annoncée, explicite le premier discours de Pierre au moment de la Pentecôte. Comme prévenait Jésus au début des Actes : « Vous allez recevoir une force quand le Saint-Esprit viendra sur vous ; vous serez alors mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux extrémités de la terre » (Act. 1, 8). Tout l’itinéraire suivi dans les Actes, de Jérusalem à Rome, montre cette ouverture progressive sur l’universel.