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Indépendance: « En Côte d’Ivoire, nos gouvernants ont fait le choix de refuser la souveraineté »Innocent Gnelbin

Indépendance: « En Côte d’Ivoire, nos gouvernants ont fait le choix de refuser la souveraineté ». Une contribution d’Innocent Gnelbin, président de 2IDé.

République depuis 1958, la déclaration d’indépendance de la République de Côte d’Ivoire à été prononcée par le Président Félix Houphouët-Boigny le 07 Août 1960. À l’occasion de la célébration de cet événement, revenons sur les paroles chargées de sens et de signification.

«Voici arrivée pour toi, ô mon pays, mon pays bien aimé, l’heure tant attendue où ton destin t’appartient entièrement. Peuple de mon pays, laisse éclater ta joie, tu mérites cette joie.
Tu as souffert plus que tout autre, en patience, longtemps. Mais ta souffrance n’a pas été vaine.
Tu as lutté, mais pas inutilement, puisque ta victoire, tu la connais aujourd’hui.
Le besoin de dignité que tu portais en toi, le voilà enfin satisfait.

Tu es libre, et, avec fierté, tu entres dans la grande famille des nations
Mais cette joie immense ne nous fera pas oublier nos morts illustres, nous pensons à eux avec reconnaissance et nous nous inclinons avec respect devant toux ceux qui sont morts en héros au cours de notre lutte émancipatrice. Nous les associons à notre allégresse

En vertu des droits indéniables qu’a tout peuple de disposer de lui-même, en ce jour béni du 7 Août 1960, je proclame solennellement l’indépendance de la Côte d’Ivoire.Vive la Côte d’Ivoire ! »

Indépendance

Il faut d’ores et déjà reconnaître tout le mérite de toutes celles et de tous ceux qui depuis 1893 et bien avant, se sont engagés pour l’émancipation des peuples de Côte d’Ivoire et d’Afrique.

À toutes fins utiles, rappelons quelques dates de cette glorieuse histoire. Guerre de Samory Touré 1870-1898. Les révoltes des Baoulé à Tiassalé et à Toumodi (1893-1900). Le soulèvement de l’Indenié en 1894. La révolte des Abbey en 1910. Le soulèvement et la répression en Pays Dida en 1910-1918. La lutte du Syndicat Agricole de la Côte d’Ivoire 1937, l’engagement du Syndicat Agricole Africain à partir de 1944, le Parti anticolonialiste et panafricain le Rassemblement Démocratique Africain (R.D.A.) dirigé par Félix Houphouët-Boigny. La marche des femmes sur Grand-Bassam des suites de l’emprisonnement de cadres du PDCI-RDA, etc…

La déclaration d’indépendance a ainsi retranscrit si justement les souffrances de bien des peuples qui ont fait le sacrifice de la lutte anticolonialiste. Cette déclaration, dans son premier paragraphe affirme : « Voici arrivée pour toi, ô mon pays, mon pays bien aimé, l’heure tant attendue où ton destin t’appartient entièrement ».

Qu’ont décidé nos gouvernants ?

La compréhension donc de nos dirigeants de cette indépendance est que désormais, à compter de cette date du 07 août 1960, notre destin nous appartient entièrement. Ainsi, il faut bien comprendre qu’avoir son destin en mains ne fait pas de vous un peuple émancipé. Car à vrai dire l’on peut justement choisir de l’être ou de ne pas l’être. De là la question suivante qui me taraude l’esprit : qu’avons-nous décidé ? Ou du moins qu’ont décidé nos gouvernants ?

Il est vrai que l’émancipation, qu’elle soit politique ou économique, est relative et demeure une quête permanente en ce sens qu’elle est fortement contextuelle. Les gouvernements successifs de la France de la cinquième République sont-ils émancipés du puissant monde des finances ? Cela n’est pas trop sûr.

Par contre le peuple français a réussi à saisir sa souveraineté et en use autant que possible. Cela malgré les multiples et complexes manœuvres du système financier.

En Côte d’Ivoire, nos gouvernants ont fait le choix résolu de refuser la souveraineté nationale et dénient à notre peuple sa souveraineté populaire. D’ailleurs comment pourrait-il en être autrement quand leurs arrivés au pouvoir est tributaire de toutes ces officines qui contrôlent les politiques économiques des Etats occidentaux.

Souveraineté

Pour espérer avoir sa souveraineté, encore faut-il avoir les manettes de son économie et pour avoir ses manettes, il faut encore trouver le mécanisme d’une croissance économique soutenue de l’intérieur. Or dans notre cas, notre économie est toujours tributaire de l’exportation des matières premières et reste donc une économie dont la croissance est volatile.

D’ailleurs notre miracle économique des années 70 s’est effondré en 80 avec la chute du prix du cacao sur les marchés internationaux. Conséquence : une succession de Programmes d’ajustement structurel (PAS), sortes d’austérités qui n’ont fait qu’appauvrir notre peuple.

Le second miracle économique selon la presse française ne semble pas lui aussi avoir survécu à cette même chute des prix du cacao à l’exportation en 2017. D’ailleurs pour la première fois notre Président a avoué que notre économie traverse des difficultés.

Dans son discours du 1er mai, du Président de la République, on a pu entendre cet aveu d’impuissance et de résignation. « En réalité après avoir connu une période d’embellie, l’économie de notre pays traverse une période difficile marquée par les chocs intérieurs et extérieurs. Bien sûr notamment la chute brutale de 40% du prix du cacao sur les marchés internationaux ».

« Prends-moi cadeau »

Sauf que l’observateur lucide peut comprendre à l’occasion de son adresse la veille du 57è anniversaire de la Côte d’Ivoire, la contradiction flagrante, en ce sens que le Président affirme que tous les signaux sont au vert.

Pour comprendre la supercherie qui se dissimule dans ce regain d’enthousiasme, il serait indiqué de regarder du coté du souffle financier acquis par ce grand deal euro bond (une dette de 1140 milliard de FCFA pour le peuple de Côte d’Ivoire) – Train urbain (projet octroyé a une entreprise française à un coup 918 milliards de FCFA).

Toute chose qui démontre, si besoin est, que sans plan de développement véritable, donc sans ressources budgétaire face à un peuple de plus en plus mécontent, nos gouvernants ne se donnent d’autres choix que de se lier les deux pieds et les deux mains joints aux officines des finances.

Cette situation a tout l’air d’un « prends-moi cadeau » de la réplique de la chanson 1er Gaou du groupe mythique Magic System. En fait, c’est une Côte d’Ivoire apathique et résignée qui se livre gratis au système financier international qui transparaît dans cette attitude des dirigeants.

À la différence des pays occidentaux, nos gouvernants font le choix du refus de la souveraineté des peuples avec le soutien de ces officines. Cela pourvu que le dirigeant qui joue au jeu de leurs intérêts demeure en place, jusqu’à ce qu’il ne soit plus politiquement correct.

Emancipation

Nos gouvernants musellent leurs peuples par des dictatures aussi imaginatives les unes que les autres. Ils tuent les libertés et les maintiennent dans un système de corruption, de sous éducation et de sous information afin d’avoir sur eux le contrôle nécessaire pour commettre leur forfait de mal gouvernance et de spoliation de nos richesses.

Ce qui est malheureux dans le cadre politique ivoirien, c’est que les peuples eux- mêmes ne semblent pas vouloir de leur émancipation. Parce que la vouloir uniquement à travers les réseaux sociaux en ligne ou dans son salon ne fait pas de vous un acteur de votre émancipation.

Le droit ne se donne pas, mais il s’obtient à l’arraché (Michael Burawoy) et cela, les ivoiriens doivent en prendre conscience. Nos dirigeants qui se sont succédé à la tête de notre Pays ont bénéficié et continuent de bénéficier de milliers de milliards sur notre dos.

Avec eux l’ensemble des réseaux financiers qui les soutiennent. Il ne faut pas être naïf pour penser que ces dirigeants feront le sacrifice de ces milliards pour l’émancipation de leurs peuples. Allons-y pour des cas pratiques tout simple.

Vous pensez sérieusement que la famille qui tient le monopole du marché de l’importation du riz va vous permettre d’être auto suffisant en riz ! Vous pensez sérieusement que les intérêts familiaux qui tiennent Webb Fontaine vont ouvrir leur segment de marché sur le port au jeu de la concurrence et faire chuter les coûts liés au commerce international au port !

Sérieusement vous pensez que les familles et officines qui tiennent l’exportation de notre cacao vont permettre sa transformation sur place jusqu’à ce que notre pays engrange la plus-value !

.andresilverkonan

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